La justice française s’est penchée sur un réseau international de blanchiment d’escroquerie dénommé le « faux président ». Ce système frauduleux, qui est de plus en plus utilisé, a permis à des escrocs de s’enrichir de manière record. Suite à cela, huit personnes ont été arrêtées.
Il s’agit certainement d’un record. Des escroqueries ont réussi à soutirer 38,3 millions d’euros à deux entreprises françaises, grâce à l’arnaque dite « du faux président ». Un promoteur immobilier situé dans le 14e arrondissement de Paris et une société de métallurgie en Haute-Marne ont été victimes des escrocs. L’affaire, qui s’étend à l’échelle internationale, a conduit à huit arrestations en France et en Israël. Des gendarmes et des policiers de plusieurs pays européens sont mobilisés pour démanteler le réseau criminel. Huit personnes ont été interpellées entre juin 2022 et janvier 2023, et sont laissées libres en attendant d’éventuelles poursuites. Deux d’entre elles font l’objet d’un mandat de recherche européen émis par le Portugal.
L’usurpation d’identité par mail
Tout a commencé en décembre 2021. Le dirigeant de la société de métallurgie haut-marnaise a porté plainte, car 300 000 euros lui ont été volés. Le même jour, c’est un promoteur immobilier parisien qui s’est également plaint, les escrocs ayant réussi à lui dérober 38 millions d’euros. Les gendarmes de la section de recherche de Reims et la brigade des fraudes aux moyens de paiement (BFMP) de la PJ parisienne ont été saisies. Les deux enquêtes ont été réunies en janvier 2022, sous l’égide de la Juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée (Junalco) financière. En juin 2022, l’agence européenne de police criminelle, Europol, a été associée au dossier.
Le principe est simple et redoutable. Un escroc usurpe par mail l’identité du dirigeant de la société et prétend à une opération financière confidentielle, afin de convaincre le comptable de virer des fonds sur un compte bancaire établi en Europe. Pour montrer patte blanche, le faux PDG demande, toujours par mail et dans la plus grande discrétion, au comptable de prendre contact avec un faux commissaire aux comptes. Le comptable, mis en confiance, effectue alors les virements. Quelques jours plus tard, un second versement de 500 000 euros doit être réalisé. C’est à ce moment-là que l’escroquerie est découverte, le comptable ayant échangé avec des collègues de travail.
Déterminer le rôle de chacun
Les enquêteurs ont pour mission de déterminer le rôle de chacun. Il ressort des premiers éléments que les suspects arrêtés en France sont considérés comme des « mules », des petites mains chargées d’ouvrir des comptes dans divers pays européens pour que l’argent volé soit transféré. Il s’agit de personnes âgées, inspirant confiance, et parfois très précaires financièrement. Les deux personnes arrêtées en Israël sont visées dans le volet « blanchiment » de l’enquête.
Depuis, ces huit personnes sont laissées libres en attendant d’éventuelles poursuites. Les enquêteurs ont saisi 3,9 millions d’euros, dont 1,1 million d’euros sur un compte au Portugal, 400 000 euros en Espagne et 700 000 euros en cryptomonnaie par le commandement de la gendarmerie dans le cyberespace (ComCyberGend). Selon Jean-Paul Douvier, le commandant de la section de recherches de Reims, c’est grâce à un travail d’investigation fastidieux que cette somme considérable a pu être saisie.