Un mois après que la justice ait décidé de classer sans suite le dossier de la contamination par le chlordécone en Guadeloupe, des citoyens ont décidé de saisir les tribunaux pour faire valoir leurs droits. C’est ce que franceinfo a appris mercredi.
Une nouvelle étape vient d’être franchie dans le dossier du chlordécone, un pesticide interdit en France depuis 1993. Mercredi 8 février, cinq citoyens antillais ont décidé de saisir le tribunal judiciaire de Pointe-à-Pitre en vue de poursuivre les acteurs privés et publics qui sont chargés de la distribution de l’eau en Guadeloupe. Les plaignants considèrent que les difficultés d’accès à l’eau et d’assainissement sur l’île sont à l’origine de nombreux risques pour la population.
Coupures et mauvais assainissement
Leur plainte met en avant plusieurs problèmes, notamment les coupures d’eau qui touchent l’ensemble de la population guadeloupéenne, perturbant gravement les institutions publiques, notamment les hôpitaux. Selon leurs dires, ces coupures peuvent durer des heures ou des jours et des milliers de personnes en sont victimes.
La qualité de l’eau distribuée est également pointée du doigt. L’Office de l’eau de Guadeloupe a relevé que sa potabilité n’est pas toujours assurée, en raison d’un mauvais assainissement et de niveaux élevés de chlordécone. En 2017, 70% des stations de traitement des eaux usées (Steu) n’étaient pas conformes à la réglementation applicable, et en 2018, ce chiffre est monté à 73%.
Risques sanitaires
L’Observatoire de l’eau en Guadeloupe a constaté que l’eau courante domestique est parfois impropre à la consommation, en raison de sa contamination au chlordécone, dont l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé la substance comme cancérigène possible.
Face à cette situation, Emmanuel Daoud, avocat des plaignants, déclare à franceinfo : « On est face à une situation totalement anormale sur le plan sanitaire, environnemental, sur l’accès à l’eau et le droit à la santé et cela doit cesser. Est-ce qu’aujourd’hui on est en mesure de savoir quelles sont les conséquences à moyen et à long terme de l’ingestion de ces types d’eau ? La réponse est non. Est-ce que cette eau est polluée par le chlordécone ? Oui. Est-ce que c’est une substance nocive pour la santé ? La réponse est à nouveau oui. »
Les plaignants dénoncent le fait que les opérateurs chargés de l’eau, les autorités nationales et locales n’ont pas pris de mesure corrective suffisante pour prévenir et remédier aux risques sanitaires dénoncés par les associations et révélés par les rapports d’audit interministériel de 2018 et l’enquête parlementaire de 2021.