Cécile Tartakovsky, une réalisatrice, a participé à la production de l’émission « Infrarouge ». Dans cette production, elle a décidé de montrer l’histoire de quatre prisonniers qui ont quitté leur prison, la maison d’arrêt de Nanterre, pour retourner aux bancs de l’école. C’était un retour aux études qui avait pour but de les aider à se réinsérer dans la société à leur sortie de prison. La réalisatrice a suivi leur quotidien et leur a donné la parole pour qu’ils puissent raconter leur expérience. Les prisonniers profitaient de cette chance pour se rattraper et pour apprendre des choses qu’ils n’avaient pas pu connaître lorsqu’ils étaient jeunes. La réalisatrice a réussi à capter les moments forts de ces quatre individus et leur quête d’une nouvelle vie après leur libération.
La directrice du centre scolaire de la prison de Nanterre, Sylvie Paré, s’est lancé le défi de faire de l’éducation un moyen de lutter contre la récidive. Cécile Tartakovsky, la réalisatrice de « Derrière les barreaux, l’école », a décidé de suivre quatre des 260 détenus du centre pendant une année pour partager son expérience avec les téléspectateurs de France 2.
Pourquoi avoir choisi de traiter ce sujet ?
En entendant Sylvie Paré parler passionnément de ses élèves majeurs, qui ont décidé de profiter de leur détention pour passer des diplômes, Cécile Tartakovsky a décidé de s’intéresser davantage à l’éducation en prison, un sujet plutôt méconnu. Elle était curieuse de découvrir le profil des élèves et les raisons qui les ont poussé à poursuivre leur apprentissage derrière les barreaux. Elle a donc commencé par visiter les installations, discuter avec les enseignants du centre et filmer les locaux pour son documentaire.
Comment sont formés les enseignants pour enseigner en prison ?
Les enseignants doivent suivre une formation spécifique pour pouvoir enseigner en milieu carcéral auprès d’élèves compliqués. Les professeurs doivent d’abord être formés pour s’occuper d’adolescents et d’adultes en difficulté d’apprentissage. Cette formation leur permet de travailler ensuite soit dans les centres scolaires, soit dans des classes Segpa.
Les enseignants doivent également être capables de supporter la détention car ils passent la journée enfermés avec les détenus en classe. Ils effectuent un stage pour savoir s’ils peuvent gérer l’environnement carcéral sur le long terme. Une partie des enseignants ne poursuivent pas cette expérience pour des raisons personnelles.
Ont-ils peur de la violence ?
La violence est plutôt rare chez les jeunes majeurs, qui sont plutôt conscients de la chance qu’ils ont de pouvoir sortir de leur cellule et passer du temps en classe. Ce n’est donc pas une source d’inquiétudes.
En revanche, pour les mineurs, les choses sont plus compliquées. L’adolescence est généralement une période plutôt explosive, et les élèves ont parfois des problèmes psychiques et psychologiques. Les professeurs doivent être capables de gérer les situations conflictuelles s’elles surviennent. C’est très important pour eux de rester vigilants constamment car ils doivent toujours garder à l’esprit qu’ils sont dans une prison.
A-t-il déjà eu des incidents à Nanterre ?
Il y a eu des incidents mineurs, tels que des radiateurs arrachés des murs et utilisés comme projectiles, des ordinateurs qui volaient, mais ils n’ont jamais été suivis d’attaques plus graves. Les enseignants ont auparavant été enfermés à clef avec les élèves, mais maintenant, les portes sont ouvertes, ce qui est plus confortable pour eux.
Ont-ils des nouvelles des détenus diplômés ?
Il y a trois types de détenus : ceux qui reviennent en prison après leur libération et continuent leur formation, ce qui est considéré comme un échec par les enseignants ; ceux dont ils n’ont plus de nouvelles, et enfin ceux qui viennent les remercier. La clé de la réussite ne sont pas les diplômes en eux-mêmes, mais plutôt le fait de restaurer la confiance en soi des détenus.
Qu’est-ce qui a le plus marqué la réalisatrice ?
Dans un premier temps, Cécile Tartakovsky s’inquiétait de rendre les détenus sympathiques à l’écran, mais elle a finalement décidé de ne pas mentionner leurs méfaits afin de concentrer son documentaire sur leur démarche et les raisons qui les ont poussé à suivre des cours. Elle a découvert des élèves désireux d’apprendre, conscients de l’erreur qu’ils ont commise et prêts à mettre leur temps de détention à profit pour se construire un avenir.