La réalisatrice Julia Ducournau, lauréate de la Palme d’or 2021 pour son œuvre « Titane », et membre du jury du Festival de Cannes pour les longs métrages en 2023, s’exprime sur le futur du septième art, qu’elle estime en péril à cause des services de diffusion en continu sur internet.
« “Aujourd’hui, on ne peut qu’espérer et se battre, car moi, j’ai très peur de la perte du cinéma, du médium filmique, qui est lié à la salle de cinéma”. Selon Julia Ducournau, le cinéma est en péril, un problème aggravé par la pandémie de Covid-19, où les spectateurs ont pris l’habitude de regarder des films et des séries sur leur téléphone ou leur ordinateur. Et toutes les activités que l’utilisateur effectue parallèlement au visionnage du film, comme manger ou téléphoner, rendent son expérience moins ancrée dans le présent. “Le cinéma est une expérience de communion, de sensorialité, avec tout un travail sur le son, l’image immense, de soi, dans son existence, dans son corps et dans le présent. Surtout, c’est une expérience du présent. Alors que sur un ordinateur, ce n’est pas une expérience du moment, mais plutôt plus régressive”. Pour elle, il est inutile de mettre en compétition l’ordinateur et le cinéma, car nous avons “besoin des deux” pour répondre à des besoins différents.
Transposer le “geste créatif”
Selon la réalisatrice, le fait de déplacer le médium sur une plateforme ou un écran affecte “le geste créatif”. “Certains cinéastes ne pensent pas comme moi, mais j’ai l’impression que cela modifie le geste créatif. Autrement dit, on ne pense plus de la même façon, tout simplement”. Car pour ces professionnels, le travail du son sera très différent si l’œuvre est diffusée dans une salle de cinéma plutôt que sur un petit écran. “Même s’il y a des gens qui peuvent se permettre des équipements très sophistiqués, et tant mieux pour eux, mais on parle tout de même d’une minorité. Ainsi, aujourd’hui, je pense que, oui, le médium cinématographique est en danger”, explique la réalisatrice.