L’ancien animateur du journal télévisé de TF1, autrefois sous le coup d’une première enquête préliminaire, a vu cette dernière être classée sans suite en juin 2021. La seconde enquête, quant à elle, qui a recueilli les témoignages de 22 femmes, arrive à son terme.
La confrontation entre Patrick Poivre d’Arvor et l’une de ses accusatrices a duré environ deux heures. C’était la première fois que l’ancien présentateur du JT de TF1 était face à l’une des femmes qui le poursuivent en justice. Cette confrontation a eu lieu début juillet, dans les locaux de la Brigade de la répression de la délinquance aux personnes (BRDP). Il s’agit de l’une des plaignantes de la seconde enquête ouverte contre PPDA en décembre 2021. Parmi les 22 femmes qui accusent l’ancien journaliste de 75 ans de viols et d’agressions sexuelles dans cette affaire, elle est la seule à ne pas être « prescrite ». Elle affirme qu’il l’a embrassée de force lors d’une soirée en avril 2018.
Cette confrontation marque la fin des investigations menées par le parquet de Nanterre. Selon nos informations, les conclusions de la BRDP devraient être transmises aux magistrats à la fin de l’été. Ces derniers décideront ensuite de la suite à donner à la procédure. Trois options sont envisagées : un classement sans suite, comme lors de la première enquête préliminaire, un renvoi de l’accusé devant le tribunal pour les faits d’agression sexuelle non prescrits si ceux-ci sont jugés suffisamment caractérisés, ou encore l’ouverture d’une information judiciaire pour poursuivre les investigations.
L’avocate de PPDA, Jacqueline Laffont, a déclaré que son client réservait ses réponses et sa défense à la justice, tout en respectant les droits des plaignantes.
Marie-Laure Eude-Delattre, qui a déposé plainte malgré la prescription, témoigne de l’attente longue et stressante des plaignantes. Elle raconte passer par toutes les émotions, entre espoir et angoisse. Elle a été la première à déposer plainte dans cette affaire emblématique du mouvement #MeToo en France, suite à la publication d’un article dans Libération où sept femmes accusent publiquement PPDA de violences sexuelles. Elle affirme avoir été violée par le journaliste en mai 1985, lors d’une soirée au Festival de Cannes.
Depuis son dépôt de plainte, Marie-Laure Eude-Delattre a été soutenue par les autres plaignantes de la première enquête. Elle se prépare désormais à un éventuel nouveau revers judiciaire, plus d’un an et demi après avoir porté plainte.
Au total, 45 femmes se sont manifestées auprès de la justice depuis la plainte initiale de la journaliste Florence Porcel en février 2021. La plupart d’entre elles déclarent avoir été agressées ou violées dans le bureau de PPDA, dans la tour de TF1, après le journal télévisé.
Alejandra M., une ancienne étudiante en journalisme franco-argentine, raconte avoir également été agressée par PPDA en 1993. Après avoir assisté au JT, elle est conviée dans le bureau du journaliste où il l’aurait violée. Elle quitte la France peu de temps après cette agression, hantée par un sentiment de culpabilité et ne se confie qu’à quelques amis. C’est en regardant une émission depuis Buenos Aires qu’elle entend parler de la plainte de Florence Porcel et décide de témoigner à son tour.
Bénédicte Martin, écrivaine, témoigne également d’une agression sexuelle dans le bureau de PPDA en 2003. Elle raconte avoir été conviée par le journaliste après avoir participé à son émission littéraire. Elle parvient à échapper à l’agression en feignant de vouloir autre chose.
La notion de « sérialité » est au cœur de cette affaire, avec de nombreux témoignages décrivant PPDA comme un prédateur sexuel. Cette notion est examinée dans le cadre de l’information judiciaire ouverte suite à la plainte de Florence Porcel. Les témoignages recueillis soulignent les similitudes dans le mode opératoire de l’accusé.
Malgré la prescription de certains faits, les plaignantes se demandent si leur nombre peut être pris en compte dans le cadre de la seconde enquête préliminaire et déclencher une nouvelle information judiciaire. Certaines avocates estiment que c’est possible si les faits ne sont pas prescrits et sont corroborés par de nombreuses autres plaintes.
Ce dossier, qui prend du temps, est considéré comme un exemple des raisons qui poussent les victimes de violences sexuelles à se taire. Les plaignantes espèrent que leur témoignage pourra libérer la parole d’autres femmes dans des situations similaires.