Le chef de l’Etat envisage d’appliquer des pénalités financières aux familles des jeunes qui sont responsables de désordres dans les quartiers.
« Nous devons toucher au portefeuille des parents pour qu’ils saisissent l’enjeu », a déclaré le 5 juillet dernier sur franceinfo Nicolas Daragon, maire Les Républicains de la ville de Valence, dans la Drôme. L’élu municipal a réussi à faire voter, en décembre 2020, des propositions visant à retirer l’assistance financière municipale à certains parents de délinquants. Emmanuel Macron envisage lui aussi d’imposer des sanctions financières aux familles des jeunes causant des troubles dans les quartiers. Le maire de Valence estime que le parti majoritaire « a finalement pris conscience des nécessités d’une société qui a énormément évolué ».
franceinfo : Quelles mesures avez-vous prises à Valence pour limiter ces aides ?
Nicolas Daragon : En fin d’année dernière, nous avons voté pour que certaines aides optionnelles fournies par la municipalité aux familles de délinquants juvéniles, qui ne prennent pas en charge correctement l’éducation de leurs enfants, soient retenues. Parmi ces aides figurent le chèque sport, le chèque culture, le contrat municipal étudiant et, dans certains cas, nous remettons en question le bail d’habitation lorsque les familles vivent dans un logement social et qu’ils perturbent tout le quartier. Nous avons adopté cette motion. J’ai dû faire face aux recours de La République en marche dans ma région et à une plainte déposée auprès de la Défenseure des droits par la députée LREM de ma circonscription. J’ai également fait l’objet d’un tweet peu flatteur de Monsieur Véran, qui trouvait cela scandaleux.
Vous sentez-vous suivi dans cette optique par le pouvoir actuel ?
Le gouvernement semble enfin comprendre les impératifs d’une société qui a énormément évolué. Alors que la protection des mineurs est bien sûr essentielle, il est également important de responsabiliser les parents et de revoir certaines lois qui exonèrent de toute responsabilité certains mineurs. Bien sûr, il est difficile de prononcer des condamnations pour des enfants de moins de 14 ans, mais pour des jeunes de 15, 16 ou 17 ans qui se montrent violents, la loi doit être modifiée et renforcée.
La Défenseure des droits vous a-t-elle conseillé de mettre en attente ce dispositif ?
Elle m’a suggéré de le suspendre car elle estime que la mesure porte préjudice aux enfants. À noter que ces mêmes enfants sont ceux que nous retrouvons dans la rue, attaquant les forces de police municipale ou nationales, voire même les pompiers. Quel impact cela a-t-il sur leur santé et leur éducation ?
« Je cible les délinquants mineurs qui rendent la vie impossibles aux 99,9 % des résidents des quartiers touchés, qui se conduisent honorablement et en ont assez de payer des taxes pour soutenir des parents qui ne prennent pas en charge l’éducation de leurs enfants. »
Nicolas Daragon, maire Les Républicains de Valence, dans la Drômeà franceinfo
Quels critères utilisez-vous pour sanctionner les parents ?
Le Conseil des droits et des devoirs des familles rencontre ces familles lorsque les enfants commencent à franchir les limites. Il leur propose des mesures d’orientation éducative. Nous avons affaire à trois types de familles : les familles qui prennent acte des mesures éducatives et comprennent la situation, celles qui ne comprennent pas mais qui se plient aux règles une fois qu’elles sont expliquées, et enfin celles qui feignent de ne pas comprendre tout en nous convainquant de l’exemplarité de leurs enfants. Dans ce dernier cas, nous suspendons les aides.
Depuis deux ans, combien de sanctions avez-vous appliquées à Valence ?
Au total, une vingtaine de familles ont été reçues. Nous avons menacé de suspendre les aides optionnelles à chaque rencontre, et face à la perspective que leurs enfants pourraient être responsables, les parents ont accepté les mesures éducatives. Ce qui démontre que la dissuasion est efficace.
Est-il nécessaire de modifier la loi pour étendre la suspension des allocations familiales à l’ensemble du territoire national ?
Il est évident que la loi doit être amendée. Les aides que nous supprimons sont optionnelles et mineures. Bon nombre de communes n’ont pas de chèque sport, de chèque culture ni de contrat municipal étudiant. Le seul moyen d’intervenir est de toucher aux aides principales, celles fournies par l’État.
Néanmoins, cela implique aussi de responsabiliser les parents, donc de leur faire comprendre que s’ils accèptent les mesures éducatives, nous les soutiendrons. Il ne s’agit pas d’une suspension automatique. D’autre part, il faut agir de manière proportionnée, c’est-à-dire qu’on ne va pas tout enlever à une famille qui pourrait finir par ne plus pouvoir se loger ou se nourrir. Mais il est impératif que cette suspension ait un impact sur le budget des parents, car c’est le seul moyen de les sensibiliser.