L’organisation de la Fondation des Femmes, dédiée au soutien des femmes subissant des violences dans le cadre conjugal, initie aujourd’hui un appel d’urgence pour des dons. Bien que les aides financières de l’État aient été revues à la hausse, elles ne parviennent pas à répondre à la rapidité croissante de la demande. Pour être plus précis, il y a eu une augmentation de 83% en matière de signalements de victimes par rapport à l’année 2019, comme l’explique la dirigeante de l’association.
La Fondation des Femmes cherche à amasser un million d’euros pour soutenir les associations en difficulté
Vendredi 1er septembre, Anne-Cécile Mailfert, à la tête de la Fondation des Femmes, a confié sur 42mag.fr que l’objectif de l’association est de réunir un million d’euros par le biais d’une collecte de fonds publique. Ce montant volontairement conséquent est prévu pour venir au secours des organisations aidant les femmes qui sont victimes de violences conjugales, et qui manquent cruellement de moyens financiers. Bien que l’État ait augmenté les allocations destinées à ces associations, la Fondation des Femmes insiste sur le fait qu’il s’agit d’une mesure insuffisante pour prendre soin de toutes les femmes concernées.
franceinfo : Qu’est-ce qui motive cette collecte de fonds urgente ?
Anne-Cécile Mailfert :
La raison derrière cette levée de fonds urgente est la situation précaire de plusieurs associations qui œuvrent sur tout le territoire. Ces associations, qui se consacrent à la protection, hébergement et assistance des femmes victimes de maltraitance, font face à des défis financiers de taille en fin d’année, et risquent la fermeture. Notre objectif est de collecter un million d’euros en faisant appel à la générosité publique, afin de secourir ces associations et leur permettre de continuer leur mission vitale et discuter en position de force avec les autorités. Il incombe à l’État de contribuer, c’est-à-dire augmenter les subventions. Les associations sont obligées de prendre en charge ces femmes et leurs besoins, mais cela s’avère souvent être un gouffre financier. Elles se retrouvent ainsi avec des déficits qu’elles n’arrivent pas à remédier.
Comment cela se produit-il ?
C’est un scénario plutôt paradoxal. Depuis le Grenelle sur les violences conjugales, il y a eu une vaste campagne de sensibilisation et d’information. Les femmes prennent désormais la parole, elles osent quitter leur maison, elles cherchent du soutien et de l’aide, et les associations sont leur premier recours. Cependant, même si ces associations ont bénéficié d’une légère augmentation de budget, cela reste nettement en deçà des besoins pour répondre convenablement à l’appel de ces femmes. Les ressources sont donc surchargées tandis que les fonds sont insuffisants. Parfois, comme c’est le cas pour Léa Solidarité dans l’Essonne, ils sont même contraints de fermer des centres d’hébergement d’urgence.
Chaque année, 29 millions d’euros sont destinés à la lutte contre la violence faite aux femmes. C’était 13 millions en 2019. Est-ce toujours insuffisant ?
En fait, si l’on cumule tous les financements des différents ministères, le montant global est bien supérieur. Il y a eu une hausse substantielle de ce budget, mais le nombre de victimes de violences conjugales qui ont signalé leur situation a augmenté de 83 % par rapport à 2019. Cette augmentation est absolument significative.
La citation d’ Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes à 42mag.fr:
« L’état n’est pas encore à la hauteur des efforts exigés, bien que sa contribution ait légèrement augmenté. Il reste un énorme fossé entre les ressources allouées par l’état et les demandes réelles sur le terrain »
La demande et l’État
L’État ne parvient pas à suivre le rythme de la demande, probablement parce qu’il pensait que ce serait un phénomène éphmère après le Grenelle ou après MeToo. Cependant, nous assistons à un changement de mentalités. Les femmes continuent de parler, de demander de l’aide, et c’est tout à fait justifié, elles en ont le droit. Elles doivent persévérer, mais l’État doit aussi être prêt à répondre à leurs besoins.
La « grande cause du quinquennat » annoncée par Emmanuel Macron est-elle en train de se noyer?
Il est étrange que nous n’en entendions plus beaucoup parler. C’est justement l’un des motifs pour lesquels nous lançons l’alerte car il ne faut assurément pas relâcher les efforts. Le fait qu’il y ait eu un Grenelle des violences en 2019 ne signifie en aucun cas que la situation est résolue. La prise de conscience est bien là chez la population. Les femmes, grâce à leur courage, cherchent à s’en sortir, mais l’État et le gouvernement restent loin derrière les attentes d’une « grande cause ». Nous espérons qu’Emmanuel Macron renouera avec cet engagement. Les quatre ans du Grenelle vont être célébrés ce week-end et le bilan fait état de 25 % moins d’argent public par femme qui est victime de violence par rapport à 2019. Cette situation est inacceptable, c’est pourquoi nous lançons un appel aux dons, en espérant que le gouvernement sécurise la suite.