A l’âge de 87 ans, le réalisateur Woody Allen a reçu quatre Oscars et a réalisé 50 films. Cependant, sa carrière remarquable est entachée par des allégations d’agression sexuelle sur sa fille adoptive, Dylan, datant de 30 ans. Des accusations qu’il a toujours rejetées et pour lesquelles il n’a jamais été inculpé. Son 50ème film, intitulé « Coup de chance », était à l’affiche lors de la 80e édition de la Mostra de Venise.
« Désagréable », « atroce », « insipide » sont certaines des appréciations précédemment adressées à la comédie de Roman Polanski. Le lundi fut l’occasion pour la Mostra de Venise de mettre en valeur un autre réalisateur controversé à Hollywood, en la personne de Woody Allen.
Allen, à la différence de Polanski qui évite brillamment la juridiction américaine depuis 40 ans suite à une condamnation pour relation illégale avec une mineure, n’est pas tourmenté par des accusations judiciaires, et aucune investigation concernant une agression sexuelle à son égard n’a été concluante.
Marginalisé
Le célèbre réalisateur de « Annie Hall » et « Match Point », connu pour son sens de l’humour et sa critique sociale, vit toutefois une certaine marginalisation dans le monde cinématographique en dépit de son âge avancé (87 ans). Il réalise très rarement des films aux États-Unis et pour certains, est devenu le symbole par excellence des violences sexistes et sexuelles.
La source de cette situation est la controverse impliquant Dylan Farrow, qu’Allen avait adoptée en tant que fille de sa précédente épouse Mia Farrow, et qui l’accuse d’agression sexuelle.
Dans un entretien de 2014 accordé au magazine L’Obs, Woody Allen partageait son désir profond de se « rendre européen, ou presque » en produisant et en finançant ses films à partir des années 2000, dans des villes comme Londres, Rome, Barcelone, Paris, afin d’être « adopté par l’Europe ».
Aux États-Unis, le documentaire 2021 « Allen v. Farrow » révèle comment Allen a pu compter sur le soutien inébranlable de l’industrie cinématographique en dépit des accusations de sa propre fille, tandis que Mia Farrow se sentait ostracisée par Hollywood.
Cependant, à partir de 2017, grâce à une tribune de Dylan Farrow et avec l’appui de son frère Ronan Farrow, avocat, journaliste et l’un des premiers à exposer le scandale Weinstein inspirant le mouvement #MeToo, la position de l’artiste se détériore.
Un regain de créativité ?
Sa présence à la Mostra, où il devrait présenter hors compétition son dernier film « Coup de chance », pourrait générer de nombreux débats. Entre ceux qui considèrent cela comme un exemple de l’impunité des artistes, et ceux qui évoquent la présomption d’innocence ou la nécessité de dissocier l’artiste de son art, tout comme le fait Alberto Barbera, directeur du festival.
Concernant son nouvel opus, « Coup de chance », serait-ce l’ultime effort d’un cinéaste dépourvu d’inspiration récemment, ou bien signe-t-il un élan créatif?
Son cinquantième film, tourné en France avec des acteurs français comme Lou de Laâge, Melvil Poupaud, Niels Schneider et Valérie Lemercier, semble être un thriller aux relents de vaudeville, construit autour d’une relation adultère dans l’élite parisienne. Il sera projeté dans les cinémas français à partir du 27 septembre.
Sofia Coppola et la conjointe d’Elvis
En ce qui concerne la compétition pour le Lion d’or, cette 80e édition de la Mostra, qui se poursuit malgré l’absence de la majorité des grands noms du cinéma en raison de la grève sans précédent des acteurs et des scénaristes à Hollywood, reste très ouverte.
Mis à mi-parcours, le film fantastique « Pauvres Créatures » du réalisateur grec Yorgos Lanthimos (« The Lobster », « La Favorite ») et avec Emma Stone en vedette, semble se détacher du lot.
D’autres films ont également retenu l’attention comme « Ferrari » de Michael Mann, avec Adam Driver, ou « La Bête » de Bertrand Bonello, avec Léa Seydoux.
Le jury, présidé par Damien Chazelle (« La la Land », « Babylon ») et incluant la réalisatrice Jane Campion entre autres, doit examiner lundi deux films attendus : « Priscilla » de Sofia Coppola, un biopic sur la femme d’Elvis Presley, et le nouveau film du Japonais Ryusuke Hamaguchi, « Evil does not exist », suite au succès de « Drive My Car » récompensé à Cannes et nommé aux Oscars.
De la sélection française, on s’attend encore à la compétition de Stéphane Brizé (« Hors-Saison », avec Guillaume Canet) et hors compétition Quentin Dupieux, récemment salué pour sa comédie « Yannick », pour son film le plus récent, « Daaaaaali! ».