L’objectif de cette modification était d’amener, d’ici l’année 2030, à l’interdiction ou la limitation considérable de l’utilisation de nombreux produits chimiques qui présentent un risque.
L’Europe vient de faire volte-face sur la réforme de Reach, sa réglementation sur les produits chimiques. Cette décision, qui a été finalisée cette semaine à Bruxelles, a de multiples ramifications, comme l’a dévoilé mardi 17 octobre le journal Le Monde:
La Commission européenne n’a pas mentionné la réforme de Reach, sa législation sur les produits chimiques, lors de la révélation de son programme pour 2024, mardi dernier. Mis en place en 2007, ce réglement européen catégorise, consigne et évalue les composants chimiques contenus dans divers produits tels que les jouets, le maquillage, les peintures et les nettoyants, qui se retrouvent finalement dans l’air que nous respirons, le sol que nous cultivons et l’eau que nous buvons. Il s’agit notamment des phtalates, bisphénols, parabènes, et bien sûr des PFAS (perfluoroalkylés et polyfluoroalkylés), également connus sous le nom de polluants perpétuels.
D’après le département français de l’Ecologie, Reach a « les moyens légaux et techniques pour garantir à tous une haute protection contre les risques provenant des substances chimiques ». En théorie du moins. En réalité, plus de 70% des 300 millions de tonnes de substances chimiques produites chaque année en Europe sont considérées comme nocives pour la santé et l’environnement par l’Europe elle-même. De plus, 18% sont potentiellement classées CMR, c’est-à-dire cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, pouvant ainsi avoir des répercussions sur le développement des fœtus.
« Assurer la compétitivité des entreprises »
Dans le but de préserver la santé des consommateurs, la Commission Européenne avait fait le vœu de réformer Reach de manière drastique. Une refonte qui aurait aussi permis d’économiser entre 11 et 30 milliards d’euros chaque année. Pourtant, cette promesse d’une « révolution » s’est avérée vaine.
Déjà, il y a un an la réforme avait été repoussée à fin 2023, suscitant la frustration de certains membres du parlement européen qui soulignaient le triomphe des groupes de pression industriels. Cette semaine, le report s’est métamorphosé en abandon. A la fin de son discours, le vice-président de la Commission européenne Maroš Šefčovič EC AV PORTAL (europa.eu) a justifié ainsi ce revirement : « nous devons prendre en compte les dommages infligés à la santé et à l’environnement tout en assurant l’approvisionnement en substances chimiques (…) et la compétitivité de nos entreprises ». Avant de clore : « Il nous faudra plusieurs années. »
La révolution Reach ne se produira donc pas, les dirigeants européens ayant choisi, d’après un responsable de la Commission européenne interrogé par 42mag.fr, de sacrifier la santé publique au profit de la compétitivité des entreprises.