Après le rendu de cette décision judiciaire jeudi, les proches de Raymond Mis et Gabriel Thiennot fondent l’espoir que ces derniers soient reconnus non coupables rétroactivement, pour l’assassinat d’un garde-chasse. Il convient de revenir sur cette affaire qui perdure depuis la conclusion de la Seconde guerre mondiale.
Thierry, le fils de Gabriel Thiennot, a exprimé son immense soulagement suite à la décision de la Cour de révision de se saisir du dossier Raymond Mis et Gabriel Thiennot. Depuis 40 ans, Thierry se bat pour innocenter son père et il n’avait plus beaucoup d’espoir en la justice. En effet, son père et Mis ont été condamnés pour le meurtre d’un garde-chasse, mais ils avaient avoué sous la torture avant de se rétracter.
Thierry Thiennot avoue que cette décision est un soulagement énorme, surtout parce qu’il ne s’y attendait pas réellement. Il considère que c’est la certitude que son père avait attendue toute sa vie. Sa première pensée va à son père et il prévoit d’aller lui rendre visite au cimetière pour lui annoncer que l’avant-dernière étape est enfin arrivée. En effet, la principale nouveauté de cette étape est que les aveux obtenus sous la torture ne sont plus considérés dans la procédure.
Selon Pierre-Emmanuel Blard, l’un des avocats de leur comité de soutien, cette affaire a été marquée par une période particulièrement sombre de l’histoire française. En effet, elle a eu lieu juste après la Libération, lorsque la violence du commissaire de police, connu pour avoir soutenu le régime de Vichy, était notoire. Mis et Thiennot étaient deux jeunes hommes, l’un communiste, l’autre résistant, qui étaient devenus des boucs émissaires idéaux.
L’affaire a commencé après la Seconde Guerre mondiale, dans la région des étangs de la Brenne dans l’Indre. Le garde-chasse Louis Boistard a été retrouvé mort, tué par quatre coups de fusil. La nécessité de trouver des coupables était urgente, et 14 chasseurs ont été arrêtés, dont Raymond Mis et Gabriel Thiennot, deux jeunes issus de milieux modestes.
Les conditions dans lesquelles Mis et Thiennot ont été détenus étaient particulièrement cruelles. Ils étaient enfermés dans la mairie de Mézières-en-Brenne, où personne ne voyait rien mais où les cris de douleur étaient audibles dans toute la ville. Après huit jours de tortures, les deux hommes ont finalement signé des aveux, avant de se rétracter rapidement. Malheureusement, il était déjà trop tard et ils ont été condamnés à 15 ans de travaux forcés.
Raymond Mis et Gabriel Thiennot ont été graciés par le président René Coty en 1954, après avoir purgé la moitié de leur peine. Leur libération a marqué le début d’un long combat pour faire reconnaître leur innocence. Même si on leur a souvent dit de tout oublier, ils ont toujours refusé et ont continué à se battre jusqu’à leur mort.
Malgré les années qui ont passé et les requêtes de révision successives, les familles de Mis et Thiennot n’ont jamais abandonné leur lutte. Finalement, grâce à un amendement présenté au Sénat par le garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti, l’affaire a été renvoyée devant la Cour de révision. La veuve de Gabriel Thiennot a exprimé son espoir d’aller sur sa tombe pour lui annoncer qu’il a enfin été reconnu innocent par tous.