Dans cette affaire, qui est le premier procès en France pour des accusations de « terrorisme d’extrême gauche » depuis l’affaire du groupe Action directe il y a 35 ans, sept individus seront jugés à Paris à partir de mardi. La durée du procès est prévue pour durer quatre semaines.
Près de 30 ans après le dernier procès d’Action directe, et cinq ans après le fiasco de l’affaire de Tarnac, l’ultragauche est de retour devant la justice. À partir du mardi 3 octobre à Paris, sept personnes seront jugées, accusées d’avoir planifié des actions violentes contre des policiers et des militaires.
Ce procès devant le tribunal correctionnel durera jusqu’au 27 octobre. Les sept accusés, six hommes et une femme âgés de 33 à 39 ans, seront jugés pour association de malfaiteurs terroriste. Trois d’entre eux seront également soumis à des poursuites pour « refus de remettre une convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie ». Ils contestent tous les faits qui leur sont reprochés.
L’affaire a commencé avec un rapport de la DGSI sur un projet d’action violente fomenté par des militants d’ultragauche. Les soupçons se sont d’abord portés sur Florian D., un anarchiste de 39 ans. Celui-ci est parti en Syrie pendant 10 mois en 2017 pour combattre l’État islamique, selon ses dires. Cependant, l’accusation le soupçonne d’avoir acquis des compétences en maniement des armes pendant son séjour. À son retour en 2018, il est immédiatement placé sous surveillance par la DGSI, qui a même placé des micros dans son camion.
Les enquêteurs sont convaincus que Florian D. essaye de recruter des personnes de son entourage et prépare une action violente en France contre des policiers ou des militaires. Ils ont également entendu parler de tentatives de fabrication d’explosifs, comme du TATP.
L’avocat de Florian D., Raphaël Kempf, affirme que rien de terroriste n’est en jeu. Selon lui, les fabrications de pétards dont il est question ont été réalisées dans un contexte ludique et expérimental, sans aucune intention terroriste. Il estime que l’accusation et la DGSI déforment les faits en prétendant que son client et les autres accusés avaient l’intention de s’attaquer aux symboles de l’État.
Les sept prévenus ont surnommé cette affaire « L’affaire du 8 décembre », jour où ils ont été arrêtés par la police en 2020. Après plusieurs mois de surveillance et d’écoutes, les suspects ont été interpellés dans différents endroits de France (Toulouse, Rennes ou Vitry-sur-Seine) et mis en examen. Parmi les prévenus, on retrouve Camille B., avec qui Florian D. entretenait une relation amoureuse, Simon G., un artificier rencontré à Disneyland lorsqu’ils avaient 18 ans, et Manuel H., qui était scolarisé au même lycée agricole que Florian D. Les trois autres prévenus, Loïc M., William D. et Bastien A., avaient rencontré Florian D. sur la ZAD du barrage de Sivens en 2014.
Les mis en cause sont soupçonnés d’avoir participé à des entraînements tactiques et de tir dans une maison abandonnée en Haute-Garonne, ainsi que d’avoir fabriqué et testé des explosifs dans le but de s’en prendre à des policiers et des militaires et de renverser les institutions républicaines. Cependant, aucune action imminente n’était prévue. Lors des perquisitions, les forces de l’ordre ont retrouvé des produits servant à fabriquer des explosifs et des armes. Les avocats des accusés considèrent qu’il s’agit d’un véritable procès « politique » et entendent critiquer l’antiterrorisme et ses méthodes.
Avant cette affaire, la dernière fois que la justice antiterroriste avait été saisie pour des faits liés à l’ultragauche remontait à l’affaire de Tarnac en 2008, où des membres du groupe étaient soupçonnés de sabotage de lignes TGV. Cependant, les qualifications terroristes avaient été abandonnées avant le procès, qui s’était conclu en 2018 par une relaxe quasi-générale. Le dernier procès pour terrorisme impliquant des militants d’ultragauche remonte à 1995, lorsque sept membres de la branche lyonnaise d’Action directe avaient été condamnés à 30 ans de réclusion criminelle.