L’appétit pour ces métaux, cruciaux pour l’évolution énergétique bien que disponibles en volume restreint, pourrait s’intensifier trente fois plus en deux décennies, boostée par la fabrication de véhicules de grande taille qui sont particulièrement énergivores.
Le WWF lance un appel à l’attention de la France : l’organisme préconise les véhicules plus petits. D’après le WWF, si la France ne prône pas la diminution des tailles et des masses des voitures électriques, dont 41% des ventes sont actuellement des SUV, elle pourrait bientôt faire face à une carence en métaux essentiels, lit-on dans une étude récente du WWF publiée le 9 novembre. Jean Burkard, directeur des actions de plaidoyer chez WWF France, explique que si le passage vers la mobilité électrique est nécessaire pour la transition écologique, le challenge réside en la taille des véhicules.
Il est précisé dans cette étude qu’un SUV électrique de grande taille consomme trois fois plus de cuivre et d’aluminium et cinq fois plus de lithium, de nickel et de cobalt qu’une petite voiture électrique. Cela pourrait conduire à une multiplication par 30 de la demande de ces métaux, qui sont essentiels à la transition énergétique mais existent en quantités limitées, dans les 20 prochaines années.
D’autant plus que ces métaux ne sont guère produits en France. En cas de pénurie, il faudrait alors choisir entre utiliser ces métaux pour les véhicules électriques, les éoliennes ou les réseaux électriques.
Une incitation à opter pour les voitures électriques légères
Pour contrecarrer ce problème, l’étude du WWF, tout comme d’autres organisations environnementales, propose l’adoption de politiques proactives incitant à la réduction de la taille des véhicules et à limiter la dépendance à l’automobile. L’organisation appelle donc le gouvernement à mettre en place un malus spécifique lié au poids et, en parallèle, à privilégier le bonus écologique uniquement pour les voitures électriques pesant moins de 1,6 tonne, comparativement à 2,4 tonnes actuellement.
Quant au malus, il s’applique pour l’heure aux véhicules électriques de plus de 1,8 tonne et devrait toucher, à partir de 2024, ceux de plus de 1,6 tonne. L’organisation préconise aussi d’imposer aux constructeurs automobiles la publication annuelle du poids moyen des voitures électriques immatriculées et envisage la création d’une amende européenne de 5 euros par kilo quand le poids de 1,6 tonne est dépassé.
Déjà en 2020, les Français sélectionnés pour la Convention citoyenne pour le climat avaient préconisé une augmentation progressive du prix des véhicules au-delà de 1,4 tonne, mais cette proposition avait rencontré l’opposition du secteur automobile.
Pour répondre aux éventuelles objections, le WWF propose de permettre aux grandes familles, qui sont obligées de choisir des véhicules plus grands, de bénéficier d’une exception.
Des « risques géostratégiques »
En l’absence de mesures adéquates, la France pourrait encourir des « risques géostratégiques », prévient Jean Burkard. La demande de la France en métaux essentiels se situerait entre 5 et 15% au-dessus de ce qu’elle devrait être par rapport à sa puissance économique. À l’inverse, en optant pour la frugalité, la France pourrait exporter une partie de son lithium, un métal précieux dont le prix a explosé, passant de 13 000 à 70 000 euros la tonne entre 2020 et 2021.
L’étude ajoute qu’en optant pour la sobriété, qui consiste à « dé-SUViser le marché électrique », on pourrait déjà réduire la demande en métaux essentiels de 17% en 2035 par rapport à un scénario de non-intervention.