Suite à une entente avec les partis de droite lors d’une commission mixte paritaire sur une version plus sévère du texte, le projet de loi sur l’immigration a été finalisé et accepté mardi au Parlement. Cette conclusion a provoqué une ramification politique au sein du parti majoritaire.
L’aval donné par le Parlement, le mardi 19 décembre, à la mouture plus sévère de la loi sur l’immigration révèle sans conteste l’extinction du macronisme précurseur. Celui-ci visait à transcender les clivages habituels, prônant une vision politique « ni de droite, ni de gauche », ou plutôt « en même temps » de droite et de gauche.
Ce mardi, l’aile progressiste de la majorité s’est rebellée contre le président de la République. Vingt parlementaires du groupe Renaissance ont voté contre le projet de loi, tandis que 17 se sont abstenus. Plusieurs ministres ayant des valeurs similaires, tels qu’Aurélien Rousseau, Clément Beaune, Roland Lescure ou Sylvie Retailleau, ont même menacé de quitter leurs postes. Le macronisme se repositionne nettement à droite, ce qui pourrait induire prochainement une reconfiguration du gouvernement.
L’appui du Rassemblement national, un révélateur
Marine Le Pen s’est encore illustrée en tant qu’habile stratège. Alors qu’elle avait d’abord voté avec la gauche pour rejeter le texte et affirmé qu’elle s’opposerait à une loi qui, selon elle, mènerait à des « régularisations en masse d’immigrants clandestins », elle a retourné sa veste, revendiquant une « grande victoire idéologique ». Une stratégie qui a fait éclater la majorité.
Pour désamorcer cette situation, Emmanuel Macron a déclaré, avant le vote, qu’il demanderait une seconde délibération si le résultat dépendait des votes des députés du RN. Il tentait ainsi d’éviter une alliance avec l’extrême droite, en dehors de « l’arc républicain ». Il n’en a finalement pas eu besoin. Cet épisode rappelle celui de Pierre Mendès-France qui, en 1954, avait déclaré qu’il refuserait l’appui des communistes affiliés à Moscou lors de son investiture. Néanmoins, pour Emmanuel Macron et la majorité, le mal politique est fait. Le durcissement du texte, en particulier l’allongement des délais pour que les étrangers en situation régulière bénéficient des aides sociales, montre une influence croissante des idées de Marine Le Pen sur la question de l’immigration.
Pourquoi ce revirement du président ?
L’absence d’une ligne idéologique bien définie sur les questions de sécurité et de société pourrait en être la cause. Le groupe Nupes pourrait à juste titre être scandalisé par le revirement répressif d’Emmanuel Macron qui renie ses engagements initiaux. Mais le président suit simplement le cours de la politique actuelle. C’est là le dilemme de la gauche. Et il est probable que cette version plus stricte de la loi, approuvée par une majorité au Parlement, bénéficie aussi d’un soutien, peut-être plus important, dans l’opinion publique.