L’arrivée de la récente ministre du Travail et de la Santé, provenant des rangs de la droite conservatrice, ne fait pas consensus dans le milieu des professionnels de la santé. Ses prises de position sur divers sujets, dont celui relatif à la fin de vie, seront observées de près.
Catherine Vautrin, le vendredi 12 janvier au matin, est entrée en fonction au sein du vaste ministère qu’elle va diriger, incluant les domaines du Travail, de la Santé et des Solidarités. Néanmoins, la figure de cette femme issue de la droite conservatrice suscite de nombreuses inquiétudes parmi les professionnels de la santé depuis sa nomination, le jeudi soir précédent, au sein du cabinet de Gabriel Attal.
Olivier Milleron, médecin et figure de proue du collectif Inter-Hôpitaux, qui alarme depuis des années sur la situation critique des hôpitaux, n’hésite pas à exprimer sa préoccupation. « En nommant Catherine Vautrin, c’est comme si la Manif pour tous faisait son entrée au ministère de la Santé. », s’exclame-t-il. Celle qui a été dans le passé membre de l’UMP, puis des Républicains, est connue pour avoir manifesté et voté contre le Mariage pour tous. Un vote qu’elle semble avoir eu à regret récemment.
Ses prises de position concernant l’avortement suscitent également des questionnements. En 2017, alors qu’elle était députée, Catherine Vautrin comptait parmi les parlementaires réclamant au Conseil constitutionnel de censurer une loi protégeant l’accès à l’avortement. On se demande alors : comment va-t-elle se positionner vis-à-vis du projet d’inscrire l’IVG dans la Constitution, qui doit aboutir prochainement ? Lors de l’acte de transmission de pouvoir le vendredi matin, la nouvelle ministre a semblé adresser des signes positifs en rendant hommage à Simone Veil, et en saluant ce moment « où son texte fondateur doit être inscrit dans le texte fondamental qui régit notre Nation ».
Catherine Vautrin va également devoir prendre en charge la réforme de l’AME, l’aide médicale d’État, plébiscitée par la droite dont elle est issue. Cependant, un grand nombre de soignants sont fermement contre cette réforme.
Un défi « colossal » pour la ministre
La nouvelle ministre aura la lourde tâche de gérer ces dossiers en parallèle, alors que « la situation des hôpitaux continuent de se détériorer », selon les mots de Jean-Luc Jouve, chirurgien pédiatre et membre du collectif Inter-Hôpitaux, vendredi soir sur franceinfo. Et le médecin de s’interroger : « est-ce que le capitaine qui va être aux commandes de ce gigantesque navire est à la hauteur du défi colossal qui se présente à lui ? ».
Une autre grande question est celle qui concerne le projet de loi sur la fin de vie, une des promesses d’Emmanuel Macron. Le Président de la République évoquait au printemps dernier la mise en place d’un « modèle français de fin de vie ». Agnès Firmin Le Bodo, prédécesseure de Catherine Vautrin au ministère de la Santé, a œuvré durant des mois sur ce futur projet de loi. Elle était favorable, tout comme la Convention citoyenne l’hiver dernier, à l’introduction d’un dispositif d’aide active à mourir en France, autrement dit de permettre le suicide assisté et/ou l’euthanasie.
Mais le Président semble hésitant, sans qu’il soit clair ce qu’il envisage ni quand le projet de loi serait présenté. Contiendra-t-il des mesures pour l’aide active à mourir ? Avec une figure conservatrice comme Catherine Vautrin en charge du dossier, l’incertitude règne. Certains craignent même que le projet ne soit abandonné.
« Il est difficile de comprendre la stratégie »
Catherine Vautrin ne sera cependant que la ministre supervisant le domaine de la santé, étant donné qu’elle est à la tête de ce « super-ministère ». « Il est difficile de comprendre la stratégie d’installer une personne éloignée de ces sujets. Nous sommes perplexes, nous qui travaillons dans les hôpitaux, en voyant le choix de casting qui nous est proposé », juge Jean-Luc Jouve.
Selon les sources de franceinfo, Agnès Pannier-Runacher prendra la direction du ministère délégué à la Santé. L’ancienne ministre de la Transition énergétique a un profil plus technique, moins politique que Catherine Vautrin, et moins représentative de la droite.