Le Conseil constitutionnel a rejeté, jeudi, plus d’un tiers de la proposition législative du gouvernement. Celle-ci avait été renforcée par de nombreuses procédures strictes obtenues par l’opposition de droite. Pour autant, les clauses ayant fait l’objet d’une censure pourraient revenir par d’autres moyens, comme au travers de nouvelles propositions de loi ou grâce à une possible révision de la Constitution.
C’est une victoire assez mitigée pour les détracteurs de la loi sur l’immigration. En effet, le Conseil constitutionnel a décidé d’invalider plus d’un tiers des articles du projet de loi, jeudi 25 janvier. Trois articles ont été rejetés en totalité ou en partie pour inconstitutionnalité, y compris la mise en place de quotas d’immigration définis par le Parlement. En outre, 32 autres articles sont considérés comme n’ayant pas de lien direct avec le texte, y compris le durcissement des conditions d’accès aux aides sociales, le regroupement familial et la mise en place d’une « caution retour » pour les étudiants étrangers. Ces éléments sont couramment désignés par l’expression « cavaliers législatifs ».
La décision du Conseil a été accueillie avec enthousiasme par de nombreux adversaires du texte, allant de la gauche aux associations et syndicats de gauche. Amnesy International a vu dans cette décision « une victoire », tandis que la CGT s’est félicitée qu’il s’agisse d’« une excellente nouvelle pour notre démocratie et notre République ». De l’autre côté, pour Les Républicains, dont la plupart des mesures restrictives ont été invalidées, la nouvelle est une défaite. Pour Eric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix, il s’agit d’« une capitulation » pour la France, ont-ils déclaré dans un communiqué conjoint.
Un texte législatif reprenant des mesures rejetées
Néanmoins, ces derniers n’ont pas l’intention de lâcher prise. Hormis trois articles, le Conseil constitutionnel a rejeté le projet de loi sans se prononcer sur le fond : les « cavaliers législatifs » pourraient donc donner lieu à un autre projet de loi. Les dirigeants Républicains ont immédiatement relevé ce point. Dans leur communiqué unique, ils exhortent le gouvernement à « réintroduire rapidement dans un texte législatif spécifique tous les éléments annulés par le Conseil constitutionnel en tant que ‘cavaliers législatifs' ».
Sans attendre, Hervé Marseille, partenaire des Républicains au Sénat et président du groupe centriste, a annoncé qu’il proposera une loi reprenant « une grande partie » des articles rejetés. « Ces articles ont été adoptés par l’Assemblée nationale et le Sénat, je suis convaincu qu’ils peuvent l’être à nouveau », a-t-il déclaré à l’AFP. Grâce à cette stratégie, la droite espère conserver des mesures telles que le rétablissement du délit de séjour illégal, la « caution retour » pour les étudiants étrangers, les restrictions du regroupement familial ou les restrictions du droit du sol. Il reste maintenant à trouver une majorité.
La perspective d’un référendum sur l’immigration refait surface
En outre, la décision du Conseil offre de nouveaux arguments à la droite et à l’extrême droite pour relancer leur idée d’une réforme constitutionnelle. « Une petite caste (…) confisque la souveraineté populaire. L’unique moyen de sortir de cette impasse (…) c’est de proposer une grande réforme constitutionnelle approuvée par référendum », soutient Eric Ciotti sur BFMTV vendredi, après avoir dénoncé un « hold-up démocratique » du Conseil constitutionnel. Jeudi, Marine Le Pen avait quant à elle considéré que « cette large censure » confirmait que « une réforme de la Constitution est la seule solution[it] possible pour répondre aux enjeux migratoires ».
En modifiant la Constitution, la droite et l’extrême droite veulent notamment permettre à la France de se soustraire aux règles européennes en matière d’immigration. Ils veulent également étendre le référendum aux questions liées à l’immigration. Lors de sa niche parlementaire, en décembre, le groupe LR avait présenté un texte incluant ces deux points, avant de le retirer, faute d’avoir recueilli assez de voix pour espérer le faire adopter. Une nouvelle proposition est-elle en vue ? « Il y aura probablement une démarche de ce genre », confirme un membre influent des LR dans les colonnes du Figaro.