Concernant le projet de loi sur l’immigration, l’accessibilité aux aides sociales sera plus rigoureuse pour les individus venant de l’étranger. Toutefois, cette mesure pourra être annulée si le Conseil constitutionnel décide de la mettre en cause.
Le 19 décembre, after une longue série de débats, le projet de loi sur l’immigration a été approuvé de manière définitive par le Parlement. Toutefois, le texte doit encore être validé par le Conseil constitutionnel. La décision des Sages doit être annoncée jeudi 25 janvier à partir de 16h30. Ce texte est controversé et certains espèrent qu’une majeure partie de celui-ci sera censurée, y compris au sein du parti présidentiel et de la gauche.
Les aides sociales pour les étrangers figurent parmi les éléments clés du projet de loi et leur accès devrait être soumis à des règles plus strictes. Pour éclaircir ce point sensible du projet de loi, 42mag.fr répond à trois questions clés.
Prestations sociales : quelles seront les allocations impactées ?
Le projet de loi concerne principalement les aides liées à la famille, comme les allocations familiales et l’APL (allocation de rentrée scolaire). Cela comprend également l’APA (allocation personnalisée d’autonomie), une aide qui bénéficie aux individus âgés de plus de 60 ans et qui est gérée par les départements. Les APL (Aides Personnalisées au Logement) sont aussi concernées. La modification des conditions d’accès s’appliquera à tous les étrangers en situation régulière qui ne viennent pas de l’Union européenne.
Auparavant, les étrangers pouvaient bénéficier de ces aides immédiatement. Désormais, ils devront attendre cinq ans, ou deux ans et demi s’ils ont un emploi. Une exception est faite pour les APL, qui pourront être accordées au bout de trois mois pour ceux qui travaillent. Il est primordial de noter que cela concerne uniquement les nouveaux arrivants. Les étrangers déjà résidents en France et bénéficiant de ces aides continueront à en tirer profit.
Quel est le nombre de personnes impactées ?
Les personnes impliquées dans l’élaboration de ce texte – les députés, les sénateurs, le gouvernement – ne connaissent pas le nombre exact d’individus qui seront affectés par ces modifications. La Caisse d’Allocations Familiales (CAF), chargée de verser ces aides, ne dispose pas de cette information non plus, car elle ne devait pas jusqu’alors demander depuis combien de temps les bénéficiaires résident ou travaillent en France.
Néanmoins, quatre économistes opposés à cette loi ont estimé, en s’appuyant sur une enquête de l’Insee, qu’environ 110 000 personnes seront pénalisées par ces mesures. Cette estimation a été validée par Louis Ragot, économiste à l’Université Paris Ouest Nanterre et qui travaille depuis 20 ans sur ces problématiques. Ils estiment que le chiffre de 110 000 est une bonne estimation, même si le nombre réel pourrait être de l’ordre de 85 000 à 150 000.
Cela équivaut à la population d’une ville comme Rouen, ce qui représente environ 2% des étrangers en France. Cela aura un impact considérable pour ces personnes, pouvant conduire à une perte de plusieurs centaines, voire jusqu’à 1 000 euros, pour les frais de crèche, le loyer ou les fournitures scolaires. Cependant, comme le précise Lionel Ragot, cet impact sur les finances de la protection sociale sera marginal, c’est à dire d’environ 1% du total des prestations sociales et familiales versées par la CAF, soit une économie de 740 millions d’euros sur 70 milliards d’euros.
Ces nouvelles conditions d’accès sont-elles susceptibles d’être censurées par le Conseil constitutionnel ?
Comme l’explique 42mag.fr suite au vote de ce projet de loi, les nouvelles conditions d’accès à ces aides sociales pourraient être censurées par le Conseil constitutionnel, car elles créent une différence entre les étrangers en situation régulière et les Français, possible rupture du « principe d’égalité » appliqué aux prestations sociales, un principe qui a été consacré par le Conseil constitutionnel en 1990.
Cependant, comme l’explique Jean-François Kerléo, professeur de droit public à l’Université d’Aix-Marseille, la conception d’égalité en France, qui est historiquement universaliste, connaît une lecture de plus en plus liée à la nationalité et la préférence nationale. Il reste donc à déterminer si le Conseil constitutionnel va protéger cette conception universaliste ou suivre la tendance actuelle.