La comédienne, auteure, metteuse en scène et romancière française, ayant déposé une accusation contre les cinéastes Benoît Jacquot et Jacques Doillon, notamment pour des agressions sexuelles sur mineur, a sollicité jeudi, entre autres choses, la mise en place d’une commission d’investigation sur les agressions de genre et violences sexuelles dans l’univers du cinéma.
Le silence entourant les violences sexuelles et sexistes dans l’industrie cinématographique a été pointé du doigt par la comédienne Judith Godrèche. Lors de son audience auprès de la délégation aux droits des femmes du Sénat le jeudi 29 février, elle a condamné sans équivoque les abus perpétrés par les ressortissants de ce secteur. « Dans l’industrie du film, il est courant qu’un bourreau se masque derrière le rôle de cinéaste pour infliger des souffrances à de jeunes actrices, les forçant ainsi à verser de vraies larmes », a-t-elle attaqué.
S’appuyant sur sa propre expérience, Godrèche a exhorté à passer de l’expression individuelle à la mobilisation collective, et a plaidé pour que les sénateurs instaurent une commission d’enquête sur ce sujet pressant. Elle dit : « J’implore votre assistance pour mettre fin à ces abus sexistes dans mon secteur ». Elle a passé deux heures à échanger avec les législateurs, au cours desquelles elle a avancé des propositions pour améliorer la situation non seulement dans l’industrie cinématographique, mais aussi dans toute la société.
Réclamer une commission enquêtant sur les violences sexuelles et sexistes dans l’industrie cinématographique
Selon Godrèche, le monde du cinéma est gouverné par la suppression des individualités. Sur les plateaux, la personnalité des actrices est souvent négligée et elles sont réduites à des objets de désir par des adultes libidineux et indifférents, sous la surveillance de témoins qui se soumettent à l’autorité du patriarcat. « On me transforme en objet, une enfant qui a été dépossédée de son identité par une société qui m’a dépouillée de mon nom », a-t-elle dénoncé.
Godrèche a ensuite supplié les sénateurs de répondre à son appel à l’aide en créant une commission d’enquête pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes dans le secteur du cinéma. Elle affirme avoir reçu plus de 4 500 témoignages corroborant les abus dans le secteur du cinéma, dont 200 cas impliquant des techniciennes qui auraient reçu sans consentement des selfies indécents d’un réalisateur français.
Appel à la réhabilitation du juge Édouard Durand
Sans détour, Godrèche a salué le travail du juge Edouard Durand, ancien président de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise). Cette institution offre un refuge pour les mères et les enfants victimes de violences sexuelles. L’actrice a déploré le fait que Durand ait été écarté de la tête de la Ciivise en décembre 2023 malgré les difficultés auxquelles la commission est confrontée.
Exiger la destitution du président du CNC, inculpé pour violences sexuelles
La cinéaste a également demandé le retrait immédiat de Dominique Boutonnat, le président du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC). Boutonnat a été renouvelé dans ses fonctions en 2022 malgré des accusations d’agressions sexuelles sur son filleul de 21 ans et son renvoi devant la justice pour ces mêmes accusations.
Instauration d’un « référent impartial » pour les mineurs sur les plateaux de tournage
Godrèche a proposé d’établir un « référent impartial » pour les mineurs qui ne serait pas rémunéré par la production et qui recevrait une formation psychologique. Cela garantirait que les enfants ne soient jamais laissés sans surveillance sur un plateau de tournage.
Appel à une réaction pérenne de la société
Godrèche a terminé son intervention en illustrant son propos par des exemples d’abus dans d’autres secteurs de la société. Son discours a été un appel poignant à un changement durable de la société, pour que personne n’ait à subir d’abus, de violence, ou à être réduit au silence.