Chaque jour, une célébrité fait une apparition dans l’univers d’Élodie Suigo. Le mercredi 7 février 2024, c’est au tour du cinéaste, Gilles de Maistre. À présent, son tout dernier film, « Le Dernier Jaguar », est lancé.
Gilles de Maistre : entre réalisation et stylisme narratif
Gilles de Maistre, cinéaste, écrivain, documentariste, globe-trotteur et producteur, a marqué l’histoire du cinéma par sa richesse et la diversité de ses oeuvres. Son documentaire : J’ai 12 ans et je fais la guerre, a remporté en 1990 le prestigieux prix Albert-Londres audiovisuel et le prix du meilleur documentaire aux Emmy Awards. Son film Féroce, sorti en 2001, a suscité de nombreux débats lorsqu’a causé Jean-Marie Le Pen a intenté une action en justice à son encontre, que l’ancien homme politique n’a pas gagné. En 2007, il réalise le documentaire Le Premier Cri, qui suit les histoires de grossesse de dix femmes de différentes cultures.
De Mia et le Lion blanc à Le loup et le lion et maintenant Le Dernier Jaguar
Gilles de Maistre est de retour sur les écrans avec une nouvelle œuvre, Le Dernier Jaguar, après avoir réalisé Mia et le Lion Blanc en 2018 et Le Loup et le Lion en 2021.
franceinfo: Votre film raconte l’histoire d’une amitié entre une petite fille et un jaguar. Il y a évidemment une histoire d’amitié, mais aussi un désir de sensibiliser les gens aux problèmes environnementaux :
Gilles de Maistre:
C’est vrai, au début de ma carrière, mes films avaient pour but de dénoncer et j’ai réalisé que ce n’était pas nécessairement la meilleure façon d’influencer les gens. Le film met donc l’accent sur la beauté de la forêt amazonienne et l’amitié entre cette petite fille et son jaguar, en soulignant leur importance et leur besoin de protection. Je suis convaincu que cette approche est plus efficace que la simple dénonciation. Mon but est de sensibiliser les enfants et les familles, comme je l’ai fait avec mes propres enfants.
Votre parcours a débuté par des études de philosophie. Puis, vous êtes devenu photojournaliste. Quand avez-vous ressenti le besoin de passer de l’autre côté de la caméra, raconter des histoires? Pas les vôtres, mais celles des autres.
J’étais mauvais à l’école, ayant redoublé trois fois, je n’arrivais pas à écrire une rédaction. Pour moi, l’écriture a été une source d’angoisse et une humiliation à l’école. L’image est donc devenue pour moi un salut, car je la trouvais plus facile à appréhender. Lorsque j’ai intégré une école de journalisme, on m’a proposé de me mettre derrière la caméra, ce qui a changé ma vie. J’ai commencé à voyager dans le monde entier avec ma caméra et j’ai toujours gardé cette curiosité et ce lien avec les gens et l’authenticité. Je suis convaincu qu’on ne peut toucher les gens qu’avec des éléments sincères.
Quelle a été votre expérience lorsque J’ai 12 ans et je fais la guerre, a été diffusé en 1990? C’est un film qui a rencontré un grand succès et qui a remporté plusieurs prix.
En effet, j’étais encore un jeune journaliste qui réalisait son travail seul avec sa caméra. J’ai passé un an à parcourir le monde pour raconter les histoires des enfants soldats. Les prix que j’ai reçus m’ont ouvert de nouvelles opportunités, mais pour moi, c’est maintenant loin derrière. Ce qui m’importe maintenant, c’est de toucher un enfant, de voir ses yeux briller après avoir visionné un de mes films et d’inciter à la réflexion.
On a remarqué un changement dans votre approche avec Le Premier Cri. On a senti que vous preniez une position plus positive. Comment avez-vous vécu ce changement?
C’est exact, avec ce film, j’ai voulu montrer le monde à travers le prisme de la naissance, en me rendant dans dix pays différents, depuis les tribus Massaï jusqu’à la plus grande maternité du monde. J’ai pu filmer des milliers de naissances qui illustraient toutes les inégalités et les différences existantes, mais aussi l’amour universel d’une mère pour son bébé. Cela m’a fait réaliser qu’en parlant d’émotions et des possibilités de changement, on peut toucher davantage les gens que par le simple débat et la critique.
Avec Le Dernier Jaguar, le message est clairement optimiste. On aborde notamment le sujet du trafic d’animaux, dont beaucoup sous-estiment l’ampleur.
Le trafic d’animaux est devenu le troisième commerce le plus rentable au monde, causant des perturbations majeures en Amazonie, où la faune et la flore sont massacrées. Cela crée un déséquilibre naturel entre les prédateurs et les proies, et les populations locales en souffrent énormément. Certaines sont même forcées de participer au trafic pour survivre.
Est-ce que vous pensez que les nouvelles générations sont prêtes à changer cette situation?
Je suis très optimiste à ce sujet. Je pense que cette nouvelle génération est très consciente de ces enjeux. On voit aujourd’hui davantage d’initiatives prises par les jeunes, comme le végétarisme, la protection des animaux, etc. Chacun peut contribuer à sa manière, que ce soit par des petits gestes comme le ramassage des déchets sur la plage, ou par des actions d’envergure, comme la protection des jaguars. Si nous sommes nombreux à agir, il sera plus facile de sauver le monde.