François Bayrou a déclaré mercredi soir qu’il ne fera pas partie du gouvernement, mettant ainsi un terme aux conjectures qui ont émergé depuis lundi, suite à sa remise en liberté dans l’affaire impliquant les assistants des députés européens. Ce qui retient l’attention, ce sont les expressions employées par le dirigeant du MoDem.
Conditions non remplies pour une participation gouvernementale
« Je ne pourrais pas m’impliquer dans le gouvernement sans une compréhension partagée profonde de l’orientation politique à prendre », déclare François Bayrou, alors que son nom est mentionné dans le contexte du remaniement gouvernemental. Suite à sa disculpation dans le dossier des assistants parlementaires lundi dernier, le maire de Pau se sent puissant et s’attend à un retour favorisé par Emilien Macron pour son soutien à ce dernier, sous forme de trois ou quatre ministères.
Pourtant, François Bayrou révèle qu’il n’a pas réussi à trouver un terrain d’entente avec le président et le Premier ministre, qui lui ont suggéré le ministère des Armées, ce qui ne répondait pas à ses attentes. Par contre, le centriste envisageait de succéder à Amélie Oudea-Castera au ministère de l’Éducation nationale, une position qu’il a déjà occupée auparavant. Cependant, il a constaté une « divergence dans l’approche méthodologique » qui, à ses yeux, « reste inacceptable ».. Il a précisé ne pas avoir postulé pour le poste lors d’une interview sur franceinfo jeudi matin, mais a affirmé « être convaincu qu’il est possible de redresser l’Éducation nationale »« . « Il faudrait pour cela un choix politique qui consisterait à le faire en collaboration avec les enseignants et les autres acteurs de l’école »« . Mais, « cela sous-entend que ‘les enseignants ne travaillent pas suffisamment' », regrette François Bayrou.
Le leader du MoDem se voyait également à la tête d’un super ministère dédié à l’Aménagement du territoire, de la Simplification et de la Réforme de l’État, axé notamment sur la » fracture Paris-province » et sur le « décalage entre les citoyens et l’action publique ». Mais la collaboration avec Gabriel Attal était notoirement tendue. Y a-t-il un fossé générationnel ? Les relations étaient évidemment tendues : « La conversation téléphonique entre eux s’est mal passée hier après-midi », raconte un témoin, pour qui « Bayrou est de nature colérique, il est comme une pendule suisse sur le point d’exploser ».
Indiscipline à venir ?
François Bayrou l’a annoncé lui-même : tout écart peut être corrigé, néanmoins, s’il claque la porte aussi bruyamment, il a peu de chances de la rouvrir comme le supposent ses amis. Ils ont d’ailleurs reproché à leur chef ce manque de consultation, lors d’un dîner prévu depuis bien longtemps. Jean-Louis Bourlanges l’a même reproché dans un communiqué publié sur X d’« affaiblir dangereusement » la majorité, tout en « ruinant la réputation » de son parti.
Le personnel proche de Macron n’a également pas apprécié ce geste explosif.
« Bayrou a toujours été très exigeant, voire trop. On lui octroie un avantage, il ambitionne plus. »
Un conseiller du gouvernementà franceinfo
Un conseiller du président craint que le choc ne soit retourné contre le leader du MoDem. « Le sanglier du Béarn est dur en affaires mais là, les termes qu’il emploie, cela laisse présager une indépendance », s’inquiète un député du groupe Renaissance qui rappelle que le MoDem compte 50 représentants et donc 50 voix à l’Assemblée.
« Il est capable de colères effrénées, mais aussi de retrouver sa sérénité par la suite », se rassure un conseiller ministériel. Pour le moment, rien ne prouve si la crise de colère de François Bayrou est personnelle ou s’il prévoit de devenir réellement dissident. Sur franceinfo, il a nié cette intention, affirmant que son parti demeure « un membre de pleine et entière du parti majoritaire qui désire reconstruire le pays » et qu’il n’a jamais remis en cause son soutien à Emmanuel Macron. La constitution finale du gouvernement, attendue dans les heures à venir, indiquera si le MoDem a toujours sa place. Cependant, un conseiller de l’exécutif a tenté de rassurer mercredi soir : il n’y a pas lieu de parler de « crise politique ».