En 2007, des photos montrant un Nicolas Sarkozy hésitant dans ses propos suite à sa première conversation en tête-à-tête avec le président russe avaient soulevé des suspicions d’excès d’alcool. D’après le journaliste Nicolas Hénin, le leader de la nation française n’était pas en état d’ébriété… mais plutôt choqué par une interaction particulièrement brutale. Dans cet extrait d' »Affaires Sensibles », il raconte le déroulement présumé de cette rencontre.
Le débat est toujours ouvert : Devrait-on discuter avec Vladimir Poutine ? Et dans l’affirmative, comment s’y prendre ? Un peu plus d’un an après l’incursion militaire russe en Ukraine, « Affaires sensibles » revient sur les dynamiques diplomatiques entre les dirigeants français et le chef d’État russe. Au poste de pouvoir depuis fin 1999, Vladimir Poutine a travaillé avec trois dirigeants français jusqu’à Emmanuel Macron : Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande. Les échanges avec chacun étaient distincts, influencés par les caractéristiques personnelles et par la conjoncture internationale.
En 2007, tout semblait bien se dérouler, du moins en surface, pour le tout nouveau président français Nicolas Sarkozy. Son premier face-à-face avec Vladimir Poutine se produit le 6 juin, lors du sommet du G8 à Heiligendamm, en Allemagne. L’atmosphère est conviviale et une sorte d’entente semble lier les deux dirigeants. Ensuite, les deux présidents se retirent pour une conversation privée, en présence uniquement de leurs conseillers diplomatiques et de leurs interprètes.
Un Nicolas Sarkozy désorienté
Après la discussion, le président français est attendu pour une conférence de presse. À leur grande surprise, les reporters voient apparaître Nicolas Sarkozy, qui semble ne pas être dans son état habituel. Certains se demandent s’il n’a pas tout simplement bu un verre de trop.
D’après le journaliste Nicolas Hénin, qui a mené une investigation sur les connections russes en France, si Nicolas Sarkozy semble désorienté, ce n’est pas dû à un excès d’alcool. Poutine, contrairement aux idées reçues sur les Russes (notamment véhiculées par son prédécesseur Boris Eltsine), n’est pas un amateur de boisson, pas plus que Nicolas Sarkozy. L’explication donnée par un proche de Nicolas Sarkozy à propos de cet état apporte une tout autre perspective. Voici l’événement comme il a été reconstitué par le journaliste.
« Une conversation comme si elle se passait entre deux voyous au pied d’un immeuble »
Pour initier ce premier tête-à-tête, Nicolas Sarkozy aurait décidé de « mettre sur le tapis tous les sujets épineux, de façon franche et directe« . Selon Nicolas Hénin, durant ces premières minutes de discussion, Vladimir Poutine serait resté relativement insensible.
Puis, « il le regarde et lui demande ‘C’est bon ? T’as terminé ?’ – Euh, oui… – Alors, avertit le président russe, montrant par un geste la différence de taille entre la France et la Russie, soit tu persistes dans cette attitude, et je te réduis en miettes, ou alors tu changes de ton, et je peux te transformer en roi de l’Europe. » Selon le journaliste, Vladimir Poutine aurait même agrémenté ces avertissements d’insultes.
Un proche de Nicolas Sarkozy a démenti cette version des faits, mais Nicolas Hénin insiste : « C’était effectivement ce choc suite à la violence de cet échange qui avait mis Nicolas Sarkozy dans cet état. C’était vraiment une conversation comme si elle se passait entre deux voyous au pied d’un immeuble. »
Extrait de « Poutine-Macron : l’affrontement des présidents », disponible à nouveau le 31 mars 2024 dans « Affaires sensibles », une production conjointe de France Télévisions, France TV presse, France Inter et l’INA, basée sur une émission de radio de France Inter.