Le président français Emmanuel Macron est arrivé lundi dans le département d'outre-mer de la Guyane française pour une visite de deux jours, pour discuter de la pauvreté, de la criminalité et d'une plus grande autonomie – un sujet épineux entre Cayenne et Paris. Le voyage sera suivi d’une visite au Brésil voisin, où Macron abordera la question de l’exploitation minière illégale dans les régions frontalières.
Lors de sa première visite sur le territoire sud-américain en octobre 2017, quelques mois seulement après son élection, Macron a rencontré des manifestants en colère contre le manque d’investissements dans cette région pauvre.
Macron était sous pression pour honorer les promesses du gouvernement sortant d'un plan d'urgence d'un milliard d'euros.
Il avait également promis à l'époque de renforcer la police locale pour lutter contre un taux de meurtres 10 fois supérieur à celui de la France métropolitaine, ainsi que de lutter contre l'immigration clandestine et l'exploitation illégale de l'or.
Cependant, il n'a pas fait bonne impression auprès des habitants, qui se souviennent de sa réponse lorsqu'ils lui ont posé des questions sur la construction d'un nouvel hôpital : « Je ne suis pas le Père Noël ».
Cette colère s’est traduite par une revanche électorale puisque 60 % des Guyanais ont voté pour la leader d’extrême droite Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle de 2022.
Pauvreté, chômage, criminalité
En 2023, la Guyane a toujours du mal à lutter contre la pauvreté, un chômage élevé, des établissements d’enseignement et de santé médiocres et des infrastructures négligées.
Ce fut également une année record en matière de crimes violents, les procureurs ayant signalé 59 homicides et 250 tentatives de meurtre, soit 20,6 homicides pour 100 000 habitants – contre une moyenne nationale de 1,5 pour 100 000 habitants.
Michel-Ange Jérémie, président de l'Association des Maires de Guyane, estime que la région a besoin d'une approche globale qui prend en compte l'éducation et la formation.
« Le nombre des forces de l'ordre est important, mais l'insécurité continue de croître », a-t-il déclaré, cité par l'AFP.
La moitié des 300 000 habitants du pays ont moins de 25 ans, en partie à cause d'un taux de fécondité élevé et d'un grand nombre de personnes qui quittent le pays.
Selon une étude de 2021 de l'Insee, 37 % des personnes âgées de 21 à 29 ans quittent la Guyane pour étudier ou travailler à l'étranger.
Parallèlement, un jeune sur trois âgé de 15 à 29 ans ne travaille ni ne suit d'études, en particulier dans les zones isolées non reliées au réseau routier limité.
Extraction illégale de l'or
Macron sera accompagné du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et de la ministre des Outre-mer Marie Guévenoux.
Ils assisteront à une cérémonie commémorative à la mémoire du major des forces spéciales françaises Arnaud Blanc, décédé il y a un an lors d'une opération contre l'exploitation illégale de l'or à Maripasoula, une région du sud de la Guyane frontalière avec le Brésil.
Selon les médias locaux, Macron se rendra également dans la ville orientale de Camopi, haut lieu de l’orpaillage illégal. De retour à Cayenne, la capitale, il observera une masterclass à l'académie locale de l'Opéra de Paris.
Lundi soir, Macron participera à un dîner avec un collectif de maires, de parlementaires et le président de la Collectivité territoriale de Guyane.
L'échange sera l'occasion d'évoquer l'évolution du statut de la Guyane au sein de la France, inspiré par la quête d'autonomie de la Corse.
Le lendemain, Macron visitera le Centre spatial guyanais, créé il y a 60 ans en mars 1964. Il jettera également un coup d'œil au bâtiment d'assemblage du lanceur Ariane 6, où se prépare la fusée pour un lancement en juin ou juillet.
Opérations conjointes avec le Brésil
Mercredi, Macron est attendu à Brasilia, où il restera trois jours.
Le Brésil et la France sont sur le point de signer un accord de coopération internationale qui permettrait aux polices des deux pays de lancer des opérations conjointes visant à lutter contre l'exploitation minière illégale en Guyane française.
Les pays ont exprimé leur inquiétude face à l'augmentation des activités minières sauvages et aux crimes environnementaux près de la frontière entre l'État d'Amapa, au nord du Brésil, et la Guyane française.
L'accord permettrait aux pays de lancer des opérations conjointes, de former des policiers et de partager les résultats obtenus à partir de l'analyse de la composition de l'or illégal extrait dans les deux pays, selon des sources brésiliennes.
Il devrait être signé lors de la visite du président français Emmanuel Macron à son homologue brésilien Luiz Inacio Lula da Silva à Brasilia fin mars.
L'accord étend un accord similaire signé par Lula et l'ancien président français Nicolas Sarkozy en 2008.
« Les Français ont exprimé leur intention d'approfondir leurs liens avec le Brésil », a déclaré à l'AFP une source au ministère brésilien de la Justice, ajoutant que le nouvel accord serait plus axé sur les opérations que le précédent.
(avec fils de presse)