L’approche de démonisation adoptée par le RN n’est pas la seule raison expliquant les revirements adoptés sur divers sujets.
La dernière semaine de février a vu un grand nombre de figures politiques faire leur apparition au Salon de l’Agriculture. Certains d’entre eux ont fait des revirements politiques spectaculaires. Par exemple, Emmanuel Macron s’est engagé à fixer des prix minimums basés sur les coûts de production afin d’assurer un revenu minimum aux agriculteurs. Jusqu’à présent, le gouvernement avait refusé de considérer cette possibilité. Ce qui est plus étonnant encore, c’est le revirement du Rassemblement National. Cet engagement de prix minimum était présent dans le programme de Marine Le Pen pour l’élection présidentielle de 2022, tout comme en 2017 et en 2012.
Néanmoins, le président du RN, Jordan Bardella, a critiqué cette proposition, la qualifiant de « piège à pauvreté », qui pousserait les agriculteurs français à être à la merci de la concurrence étrangère. Marine Le Pen a tenté de minimiser le désaccord, mais certains de ses proches ont été déconcertés par l’erreur politique de Jordan Bardella. De son côté, Marine Le Pen a également changé d’avis quant à l’utilisation des pesticides. Il y a trois ans, elle condamnait l’usage du glyphosate, qu’elle défend désormais.
Ces positions changeantes sont le résultat de la politique du RN, qui cherche à capitaliser sur les frustrations du peuple et à se présenter comme une option fiable, dans une démarche que Marine Le Pen nomme la « dédiabolisation ». Ils ne sont donc pas à l’abri de promettre des choses… opposées. C’est particulièrement perceptible en ce qui concerne l’Europe. Le parti la critique constamment, la décrivant comme une « prison », mais ne souhaite nullement la quitter. En fin de compte, par pur populisme, le RN est devenu le véritable champion du « à la fois ceci et cela ». Ces contradictions sont aussi le reflet des tensions naissantes au sein du parti d’extrême droite.
La possible échéance de 2027
De plus en plus de membres du RN voient en Jordan Bardella un rival pour Marine Le Pen. Beaucoup estiment qu’il serait un meilleur candidat pour l’élection présidentielle de 2027. C’est d’autant plus vrai si Marine Le Pen se trouve condamnée en fin d’année pour détournement de fonds publics dans l’affaire du Parlement européen et des assistants fictifs. Comme l’a signalé un leader du RN, si Jordan Bardella parvient à récolter au moins 25% des voix aux élections européennes, il pourrait se vanter du meilleur score au premier tour dans l’histoire du parti d’extrême droite. C’est sûrement la raison pour laquelle Marine Le Pen a déclaré, lors de sa visite au salon de l’Agriculture, qu’elle est « en cours de préparation pour une quatrième candidature présidentielle ». Comme si quelqu’un en doutait.