Plus de 3 000 enseignants ont apporté des réponses aux interrogations posées par le syndicat du corps professoral. Les réponses fournies apportent un éclairage sur ce qui les motive et sur les effets, au jour le jour, de l’accord suggéré depuis le début de l’année scolaire en septembre.
Au cours d’une conférence de presse tenue le jeudi 29 février, le syndicat SE-Unsa a présenté les conclusions de son étude concernant le pacte enseignant. En vigueur depuis le début de l’année scolaire 2023, ce programme vise à augmenter le salaire des enseignants en échange d’une ou plusieurs tâches supplémentaires (remplacements de courte durée, participation au programme « Devoirs faits » dans les collèges, etc.).« Nous approchons désormais les 30% d’enseignants ayant adhéré au pacte », a déclaré le Premier ministre, Gabriel Attal, en janvier dernier.
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Selon le SE-Unsa, il était impératif de recueillir l’avis du personnel scolaire sur ce sujet. À cet effet, du 8 décembre 2023 au 3 janvier 2024, le syndicat a envoyé un questionnaire aux enseignants, aux CPE, aux psychologues de l’Éducation nationale, tant titularisés que contractuels. 3 378 d’entre eux ont répondu à l’enquête. Le syndicat précise que 63% d’entre eux n’ont pas adhéré au Pacte enseignant, tandis que 37% l’ont fait.
Missions déjà effectuées mais non rémunérées précédemment
L’insuffisance de la rémunération est parmi les raisons majeures données par les enquêtés ayant adhéré au pacte enseignant (69,9%), constate le SE-Unsa. Par ailleurs, une part plus importante des enquêtés, à hauteur de 77%, a indiqué trouver les missions intéressantes.
D’autre part, 66,3% des enquêtés inscrits à ce programme soulignent qu’ils sont rémunérés pour les tâches qu’ils accomplissaient déjà auparavant, principalement pour des projets avec des élèves (cours de théâtre, chorale, soutien scolaire…). Cependant, les remplacements de courte durée, qui étaient une des motivations principales du gouvernement, ne font pas partie de ces missions, pour la plupart.
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Près de 90% des répondants qui ont refusé d’adhérer au pacte enseignant le justifient par une charge de travail déjà conséquente et l’opposition de principe ou de conviction, respectivement. De plus, 35,4% ne sont pas intéressés par les missions proposées. « Cependant, ils indiquent également qu’en dépit de la non-adhésion au pacte, leur rémunération actuelle ne les satisfait pas (85%) », ajoute le SE-Unsa.
Collègues moins disponibles en raison du pacte
Cette étude qualitative, sans valeur statistique, met en évidence des perceptions très variées des effets du pacte enseignant. « Un peu plus d’un quart des collègues ‘non pactés’ estiment que leurs collègues ‘pactés’ sont moins libres, tandis que seulement 17% des ‘pactés’ partagent cette opinion », selon le syndicat. Mais 65,3% des signataires du pacte enseignant estiment que cet engagement « affecte les heures des réunions et perturbe leur emploi du temps ».
« Ceux qui y ont adhéré vont devoir consacrer plus d’heures en plus. Cela va les empêcher de disposer autant de temps qu’ils le désirent pour les moments de discussion avec leurs autres collègues. C’est-à-dire que même les collègues qui n’ont pas adhéré au pacte vont être affectés par les choix de leurs autres collègues. Cela peut engendrer des tensions au sein des équipes et causer une dégradation des conditions de travail de nos autres collègues », déclare Audrey Lalanne, secrétaire nationale du SE-Unsa chargée de la qualité de vie et des conditions de travail, sur Franceinfo. 20% des enquêtés, qu’ils aient ou non signé le pacte enseignant, déclarent que ce dispositif a provoqué des tensions entre professeurs.
Augmentation de la fatigue
Sur le plan personnel, « c’est bien la fatigue qui est ressortie comme l’un des premiers éléments, avec une différence genrée puisque ce sont davantage les femmes qui se disent fatiguées (36,7%) par rapport à l’exercice des missions pacte que les hommes » (29,6%), note sur France Inter Gilles Langlois, le secrétaire national de l’Unsa. 34,8% des adhérents au pacte se sentent « davantage fatigués » selon cette enquête. Près de 30% ont « moins de temps pour le travail en amont et en aval de leurs obligations de service », et 15,4% ont « moins de temps pour rencontrer les familles ».
Une rencontre était prévue en février au ministère de l’Éducation, mais elle a été annulée en raison du changement récent de ministre, et aucune nouvelle date n’a été fixée.