Par le biais d’une initiative législative verte, le système de bonus à la conversion va autoriser des ateliers mécaniques altruistes à recueillir les automobiles à faibles émissions qui sont prévues pour être détruites.
Environ 150 regroupements opèrent aujourd’hui comme des garages solidaires à travers la France, indique un document du Sénat. Ces organismes ont pour mission de louer, entretenir, réparer ou commercialiser des voitures pour un public avec des ressources limitées. Ces garages solidaires, qui reposent essentiellement sur des donations de véhicules, ont été néanmoins handicapés ces dernières périodes par la prime à la conversion. Une loi proposée par les écologistes, adoptée de façon définitive par le Parlement le 27 mars, va renverser la situation. Au lieu de destiner des voitures peu polluantes à la destruction dans le cadre de la prime à la conversion, cette loi permettra aux autorités locales de récupérer ces véhicules. Le but : les mettre à la disposition des personnes les plus démunies en les louant à des tarifs réduits.
A Savigny-sur-Orge, dans la région parisienne, l’organisation « Essonne Mobilité » dispose de son propre garage solidaire. Les ventes, les réparations et les locations sont effectuées par des employés en cours de réinsertion professionnelle, et les bénéficiaires avec des revenus modestes sont ravis du service rendu à bas coût. Willy, une femme de 45 ans, mère célibataire et travailleuse intérimaire de nuit, vient abandonner un véhicule de location pour récupérer sa voiture réparée. « Sans voiture, on est limité car l’accès aux transports ici est très restreint. Les transports, c’est un luxe !« , s’exclame-t-elle, tout en précisant qu’elle commence à 21h pour finir à 6h.
Sans ce service pour la dépanner durant la période de la réparation, Willy aurait dû renoncer à trois jours de travail salarié. « Et peut-être qu’on m’aurait remplacée, » partage-t-elle. À la caisse, la location du véhicule de secours lui coûte 24 euros, « Pour trois jours, avez-vous déjà vu ça ailleurs ? Jamais! » s’exclame-t-elle, joyeuse.
Obtenir des voitures de meilleure qualité
Grâce à la loi votée par les parlementaires, les garages solidaires disposeront de beaucoup plus de véhicules à louer aux personnes à revenus modestes. Ils pourront ainsi récupérer des voitures à essence peu polluantes, cédées dans le cadre de la prime à la conversion vers les véhicules électriques ou hybrides. Seules les voitures à essence classifiées « Crit’Air 3 » ou supérieur sont cependant éligibles.
Dans le garage d’Essonne Mobilité, la location représente 15% de l’activité. Elle mobilise une dizaine de voitures et compte environ une trentaine de bénéficiaires par an. Si 90% viennent de dons privés, « le service pourrait être élargi car il y a de la demande, » explique Guillaume Garson, le directeur de l’organisation. Ainsi pour lui, la loi adoptée par le Parlement est plutôt « porteur d’espoir. » « C’est un signe de l’intérêt des élus face à ce problème, et une reconnaissance qu’on dispose d’une réserve de mobilités qui peut être judicieusement exploitée… Il est même probable que la qualité des véhicules soit supérieure à celle des véhicules qui nous sont donnés actuellement par des particuliers, » ajoute-t-il.
Contrer un effet indésirable de la prime à la conversion
Avec cette loi, les élus ont également souhaité atténuer un effet nuisible de la prime à la conversion. Ce mécanisme permet à des individus, sous certaines conditions de revenus, d’obtenir une aide pour acquérir un véhicule peu polluant en échange de la mise au rebut de leur ancien véhicule. « C’est vraiment le point faible de ce dispositif », explique Marie Pochon, députée écologiste de la Drôme et rapporteuse de la proposition de loi. « On envoie un grand nombre de véhicules – 90 000 en 2022 – à la casse directement, et de ce fait les propriétaires font moins de dons aux organisations. »
Avec cette loi, les élus écologistes espèrent injecter entre 10 000 et 30 000 voitures dans le circuit de la location solidaire. Selon une étude de 2022, sur laquelle se sont fondés les sénateurs qui ont défendu le texte, plus de 13 millions de Français sont confrontés à une situation de « difficulté de mobilité ».