Les défenseurs du logement en France tirent la sonnette d'alarme face à ce qu'ils considèrent comme une augmentation inquiétante du nombre de personnes qui pourraient se retrouver expulsées de leur logement à la fin du moratoire hivernal annuel sur les expulsions. Les personnes incapables de payer leur loyer risquent autrefois d’être expulsées par la police et nombre d’entre elles se retrouveront à la rue faute d’autres options de logement.
La trêve hivernale annuelle de cinq mois sur le logement a pris fin dimanche et ses défenseurs préviennent que quelque 140 000 personnes risquent d'être expulsées en 2024.
« Pour les ménages du bas de l'échelle, il est difficile de subvenir à leurs besoins en fin de mois, et au final, les risques de non-paiement du loyer peuvent se transformer en procédures judiciaires et en expulsions par la police », Manuel Domergue, directeur de recherche à la fondation Abbé Pierre qui œuvre sur les questions de logement et de pauvreté, a déclaré à 42mag.fr.
Le nombre d’expulsions a considérablement augmenté ces dernières années, avec un nombre record de 21 500 expulsions réalisées en 2023.
C'est 23 pour cent de plus que l'année précédente, et sept fois plus qu'il y a 30 à 40 ans, dit Domergue, qui souligne la hausse des prix des loyers ainsi que l'inflation et la hausse des prix de l'énergie comme raisons pour lesquelles les gens ne peuvent pas payer leur loyer.
Une loi favorable aux propriétaires
Lui et d’autres défenseurs soulignent également une loi adoptée en juillet qui facilite la présentation des avis d’expulsion par les propriétaires et criminalise les squatteurs vivant dans des immeubles vides.
Les personnes expulsées sont censées bénéficier d’un logement temporaire, mais les services sont débordés.
« Nous savons qu'il y a un manque de logements sociaux ou de logements temporaires, donc il y a des gens qui se retrouvent à la rue sans autre option », a déclaré Domergue, ajoutant qu'un tiers des ménages ne parviennent pas à trouver un nouveau logement un à trois ans après. leurs expulsions.
Les deux tiers des ménages qui trouvent un logement ne le font qu'après une année passée à parcourir des chambres d'hôtel et des séjours chez des amis ou en famille.
Logement olympique
Les défenseurs du logement s'inquiètent également de la tenue des Jeux olympiques à Paris cet été, qui ont fait grimper les prix des hôtels et mis à rude épreuve le marché du logement déjà tendu dans la capitale.
Le groupe militant Droit au logement (DAL) a dénoncé ce qu'il qualifie d'expulsions « frauduleuses » perpétrées par des propriétaires qui cherchent à louer leurs propriétés à des prix plus élevés aux touristes.
L'agence d'information sur le logement Adil à Paris a constaté que 28 pour cent des avis d'expulsion étaient invalides entre septembre 2023 et février 2024, contre 19 pour cent pour la même période l'année précédente.