Introduit lors de la 48ème édition du Festival international du cinéma de Toronto, le tout premier film de la metteuse en scène Farah Nabulsi met en lumière la persévérance des Palestiniens, qui sont confrontés à des actes de tyrannie.
« J’aimerais que mon film fasse réfléchir« , nous livre Farah Nabulsi, réalisatrice britannique d’origine palestinienne, dans un enregistrement vidéo réalisé spécialement pour le public du Festival Ciné Palestine. Suite à des contraintes de déplacement, il lui était impossible de présenter The Teacher, son premier film de fiction, en personne. Présenté précédemment au 48e Festival international du film de Toronto, ce dernier est actuellement en démonstration au festival parisien. Le film nous emporte dans l’histoire de Bassem, incarné par l’acteur palestinien Saleh Bakri (Le Bleu du Caftan), un enseignant palestinien qui jongle entre son rôle dans la résistance politique et son devoir paternel envers l’un de ses élèves, Adam.
Selon Farah Nabulsi, son film porte une intrique amoureuse parentale et revendique une quête de justice. « Je souhaite que ce film apporte un contexte souvent absent des discours et qui est d’une importance fondamentale pour comprendre le génocide actuel« , déclare-t-elle dans la vidéo pour le festival. Son premier film, The Present, nommé aux Oscars, a reçu une quarantaine de distinctions lors de différents festivals et mettait déjà à l’écran l’acteur Saleh Bakri.
« Criminalité légitimée »
The Teacher a bénéficié de la reconnaissance du jury et obtenu le prix du meilleur acteur pour Saleh Bakri lors du Festival international du film de la mer Rouge, qui valorise les nouveaux talents d’Arabie Saoudite et du monde Arabe. Le film a été tourné à Naplouse, lieu de la Cisjordanie occupée, durant trois mois.
Basé sur des faits réels, ce film illustre les inégalités dévastatrices entre Palestiniens et colons israéliens, qui perturbent profondément le territoire.
Dans un décor de montagnes s’élevant à perte de vue et d’oliviers dominants du paysage aride de Palestine, les soldats israéliens sont omniprésents et abusent de leur autorité sur la population. Bassem est enseignant dans un village. Il a été emprisonné à plusieurs reprises pour son engagement dans le mouvement de résistance palestinien, avant de se retirer et de ne plus retourner en prison pendant près de 20 ans. Avec Lisa, une bénévole britannique luttant pour la réintégration des mineurs incarcérés, il encadre plusieurs adolescents ayant connu la prison.
Parmi eux, Yacoub, est assassiné par un colon israélien qui avait tenté d’incendier délibérément un champ d’olives, sous les yeux de son frère Adam, de Lisa et Bassem. La réalisatrice réussit à faire de cet évènement tragique un symbole des nombreux défis que rencontrent les Palestiniens. Selon Bassem, ce comportement des colons représente une « criminalité légitimée« , commise en toute impunité, caractérisée par des destructions de maisons et des menaces envers les Palestiniens. Adam, soutenu par Bassem et Lisa, entreprend un procès dans l’espoir d’obtenir justice pour son frère. Mais comme l’explique une avocate israélienne luttant contre la colonisation, « Il est rare que l’État engage des poursuites pénales« .
Résilience et dignité
« Crois-tu encore en la justice ?« , demande Adam à son professeur. « Peut-être, c’est possible« , lui répond-il, les larmes aux yeux. Farah Nabulsi dépeint avec finesse comment les injustices touchent profondément ses personnages, les poussant parfois à commettre l’irréparable. La colère et le désir de vengeance sont le quotidien d’Adam. Les souvenirs tourmentés de Bassem, de l’incarcération de son propre fils, se font l’écho de son engagement dans la résistance, un espoir de mettre fin à ces injustices.
« Le deuil est difficile mais la vengeance ne te mènera nulle part« , tente de persuader Bassem. Malheureusement, la haine engendre la haine, la violence appelle à la violence et Adam, pris dans un engrenage, ne voit plus d’issue. Toutefois, malgré ce monde marqué par les abus de pouvoir, Farah Nabulsi met en lumière la résilience, la force et la capacité inébranlable des Palestiniens à se reconstruire, demeurant fidèles à leur dignité.
La dixième édition du Festival Ciné Palestine 2024 se tient en Ile-de-France et à Paris jusqu’au 16 juin.
Détails du film
Genre : Fiction
Réalisateur : Farah Nabulsi
Acteurs : Saleh Bakri, Imogen Poots, Muhammad Abed Elrahman, Mahmood Bakri
Pays : Grande-Bretagne, Palestine
Durée : 115 min
Sortie : Prochainement
Distributeur : Goodfellas
Synopsis : Bassem, un professeur palestinien, tente de concilier son engagement dans la résistance politique risqué avec une nouvelle relation avec Lisa, une bénévole, et l’aide affective qu’il donne à l’un de ses élèves, Adam.