« Comme le feu » s’inscrit parfaitement dans la lignée d’un cinéma québécois qui excelle à représenter les émotions humaines au moyen de scènes de dialogues étendues.
Le cinéaste canadien Philippe Lesage nous entraîne dans un huis-clos en pleine forêt, où les émotions de quelques amis explosent de toute part. Avec « Comme le feu », son troisième long-métrage de fiction inspiré par une expérience vécue par son frère, Lesage explore encore davantage son univers autobiographique. Le film sort en salles le 31 juillet.
Blake (joué par Arieh Worthalter), documentariste, convie son ancien collaborateur et ami Albert (Paul Ahmarani), scénariste, à un séjour dans son chalet isolé dans la nature québécoise. Albert vient avec sa fille Aliocha (Aurélia Arandi-Longpré) et son fils accompagné de Jeff, le petit ami de son fils, secrètement amoureux d’Aliocha. La bande est complétée par une monteuse, deux amis de Blake, et un couple : Hélène (Irène Jacob) et Eddy.
Jeff, qui aspire à devenir réalisateur, nourrit une grande admiration pour Blake mais se sent rapidement envahi de jalousie en réalisant l’intérêt qu’Aliocha porte à l’ami de son père. Les tensions non résolues entre Blake et Albert refont surface, empoisonnant ces retrouvailles et transformant l’ambiance en un déballage de rancœurs.
Chasse, pêche et désillusions
Philippe Lesage orchestre ces passions humaines en pleine nature. Dépendant de Blake, qui les a transportés sur les lieux en hydravion, le petit groupe se retrouve coincé dans cet environnement à la fois sublime et hostile.
Au fur et à mesure du récit, le réalisateur accentue la tension, la portant parfois jusqu’au thriller. À travers une mise en scène qui tire parti des paysages – forêts inquiétantes, rivières agitées, chalet chaleureux – Lesage met en lumière les émotions et les conflits des personnages, dans une atmosphère quasi-tragique.
Dans ce cadre, Blake se détache en figure dominante, habile chasseur et pêcheur, charismatique et énigmatique. Albert, quant à lui, apparaît fragile, maladroit et sentimental, cantonné aux plaintes et aux récriminations. Blake, fidèle à ses idéaux, contraste avec Albert, dont la vie a été faite de compromis. Pourtant, ces oppositions s’atténuent quand Blake révèle une part de faiblesse, allant jusqu’à laisser couler quelques larmes.
Dans ce récit initiatique, Philippe Lesage explore le rôle éducatif des adultes et leur impact sur les adolescents en quête de modèles, parfois décevants. Il aborde également la découverte des premiers amours, un thème qu’il avait déjà traité dans son film précédent, « Genèse ».

Les nombreuses scènes de dialogues sonnent avec une sincérité désarmante, s’inscrivant dans la tradition du cinéma québécois, habile à révéler les vérités de la nature humaine à travers les échanges verbaux.
Le film, rythmé par de longs plans-séquence, exploite de manière judicieuse le silence, les bruits ambiants et la musique. Ce tempo lent évoque le temps qui passe, reflétant les regrets et les échecs de Blake et d’Albert, les opportunités manquées.

La fiche
Genre : Drame
Réalisateur : Philippe Lesage
Acteurs : Noah Parker (II), Aurélia Arandi-Longpré, Arieh Worthalter, Irène Jacob
Pays : Canada
Durée : 2h41
Sortie : 31 juillet 2024
Distributeur : Tandem/Shellac
Synopsis : Jeff, 17 ans, est secrètement amoureux d’Aliocha. Tous deux admirent le mystérieux Blake, un vieil ami du père de la jeune fille, qui les invite à passer quelques jours dans son chalet de chasse au cœur du grand nord canadien. Là, en pleine nature, les deux adolescents se confrontent à un monde d’adultes puérils, prêt à s’embraser.