C’est dans une atmosphère vibrante, agrémentée d’un déluge de ballons ornés des teintes du drapeau américain, que Kamala Harris a officiellement accepté la candidature du parti démocrate. Cela a eu lieu après une semaine de convention riche en festivités, un véritable spectacle à la hauteur des traditions américaines. Cette cérémonie marquante constitue le thème du septième épisode de Washington d’ici, le podcast unique produit par les correspondants des médias francophones publics.
À l’issue d’une campagne électorale totalement bouleversée, qui évoque les intrigues de House of Cards, la vice-présidente Kamala Harris se retrouve candidate pour le Parti démocrate. Un moment marquant, car alors qu’un homme blanc de 81 ans était pressenti, la première femme noire se voit désormais porter le flambeau. À 59 ans, Kamala Harris s’affirme comme une pionnière.
Lors de cette convention du parti, une atmosphère particulière se faisait sentir, marquée par un véritable élan d’enthousiasme et d’espoir. Les militants démocrates, qui étaient pour beaucoup désenchantés et inquiets quelques semaines auparavant, lorsque Joe Biden était encore pressenti comme candidat, semblaient revigorés.
« Il y avait une ambiance incroyable, éblouissante, un souffle nouveau« , témoigne Sébastien Paour de Radio France. « Elle a pris le relais d’un homme vieillissant, et quand il a foulé la scène, je me suis interrogé sur la raison pour laquelle cet homme à la démarche hésitante avait pu être candidat. Kamala Harris a clairement éclipsé Joe Biden, le renvoyant à l’arrière-plan de l’histoire.«
Le fil conducteur de cette convention était la joie, mais des avertissements étaient aussi lancés. « C’est un terme que l’on a beaucoup entendu. Kamala Harris est qualifiée de présidente de la joie, comme l’a souligné Bill Clinton. Cependant, il y avait des mises en garde, car la victoire n’est pas acquise d’avance pour les démocrates« , a précisé Frédéric Arnould de Radio-Canada.
Un discours très attendu
« Au nom du peuple, au nom de tous les Américains, indépendamment de leur affiliation politique, de leur origine ethnique, de leur genre ou de la langue que vous parlez. Au nom de ma mère, et de toutes celles et ceux qui ont emprunté un parcours de vie unique. Au nom des Américains qui ressemblent à ceux qui ont partagé ma jeunesse, ces individus qui travaillent ardemment, rêvent et veillent les uns sur les autres. Au nom de toutes les histoires qui ne peuvent s’écrire que dans ce pays emblématique, j’accepte la nomination que vous m’offrez pour devenir présidente des États-Unis« , a déclaré Kamala Harris lors de son discours.
Elle a débuté en évoquant sa propre histoire, ce qui s’est révélé être un choix tactique. « Il est nécessaire d’exposer son récit personnel, de partager son histoire, devant ceux qui pourraient être des électeurs, pour qu’ils puissent s’y identifier« , commente Sébastien Paour. Kamala Harris a rencontré des difficultés à révéler sa vie personnelle ces dernières années, mais c’était essentiel. « Nombreux sont les Américains qui connaissent le nom de Kamala Harris, mais beaucoup ne savent pas qui elle est véritablement, c’est pourquoi cette présentation est cruciale sur le plan politique« , analyse Jordan Davis de RTS.
La liberté mise en avant
Le concept de liberté a occupé une place prépondérante dans ses propos, la chanson Freedom de Beyoncé étant adoptée comme hymne de sa campagne. La décision des démocrates de focaliser sur ce terme s’explique par le fait que les libertés, notamment « les droits individuels concernant le corps ou les droits de la communauté LGBT« , parlent particulièrement à la jeune génération, contrairement à Joe Biden « qui mettait l’accent sur la sauvegarde de la démocratie, concept plus abstrait pour le peuple« , analyse Guillaume Naudin de RFI. « De plus, les Républicains ont depuis longtemps fait de la liberté un axe central de leur discours, se l’appropriant, et les démocrates tentent de le récupérer.”
Une politique étrangère qui rassure ?
Kamala Harris a également abordé la question des relations internationales, en particulier le conflit à Gaza, qui préoccupe de nombreux électeurs démocrates. « C’est un moment crucial. » Kamala Harris a affirmé vouloir « œuvrer à mettre un terme à cette guerre, et travailler à ce que l’État palestinien obtienne son droit à l’autodétermination. Nous avons eu une réaction immédiate des délégués« , déclare Frédéric Arnould de Radio-Canada. « Une part significative, très à gauche du parti, manifeste encore une certaine hésitation à la soutenir à cause de Gaza, mais ce message pourrait engendrer des effets. »
Un électeur a exprimé son avis en suggérant que ce discours allait rassurer ceux qui trouvaient son programme flou, en particulier les indécis. « Je pense que son intervention était percutante. Elle a su remédier aux critiques que les électeurs indécis pouvaient évoquer.«
Un défilé de célébrités pendant la convention
La convention a vu la participation de plusieurs célébrités telles qu’Eva Longoria, Stevie Wonder et la chanteuse Pink, mais les véritables attractions de la semaine ont été Barack et Michelle Obama. Michelle a « électrisé l’assemblée tout en conseillant aux démocrates de ne pas succomber à l’euphorie, en leur rappelant qu’il était vital d’agir, de mobiliser les gens pour transformer cet enthousiasme en voix. Elle a magistralement brillé lors de cette semaine« , estime Guillaume Naudin de RFI.
Selon les derniers sondages, Kamala Harris commence à prendre une légère avance. La prochaine grande étape sera le débat entre Kamala Harris et Donald Trump programmé pour le 10 septembre.
« Washington d’ici » est un podcast des médias francophones publics. Chaque mois, les correspondants de 42mag.fr, RTBF, Radio-Canada, RTS et RFI analysent les informations les plus récentes concernant la campagne pour l’élection présidentielle américaine de 2024. Avec Sébastien Paour (franceinfo), Jordan Davis (RTS), Frédéric Arnould (Radio-Canada), Sonia Dridi (RTBF) et Guillaume Naudin (RFI). Réalisation : Philippe Benoît (RTBF) et Régis De Rath (RTBF).