Marie-Claire Carrère-Gée, sénatrice Les Républicains et alliée de Michel Barnier, a été nommée à ce nouveau poste de ministre déléguée. L’introduction de ce titre inhabituel a suscité un mélange d’étonnement et de questionnements parmi les acteurs politiques.
Elle est l’une des figures emblématiques du parti avec une fidélité sans faille, finalement récompensée par une fonction quelque peu énigmatique. À 61 ans, Marie-Claire Carrère-Gée, sénatrice appartenant au parti Les Républicains, voit sa carrière politique couronnée pour la première fois par un poste ministériel. Débutant officiellement ses fonctions le lundi 23 septembre, elle a foulé le sol de la cour de Matignon avant de participer à son premier Conseil des ministres. Cette ancienne secrétaire adjointe de l’Élysée sous Jacques Chirac est étroitement liée à Michel Barnier, pour lequel elle dirigeait la campagne durant les primaires de la droite en 2021.
« Seuls les LR peuvent désormais espérer obtenir Matignon et devenir le pivot d’une majorité plus large, englobant tous ceux qui se réclament de la droite, du centre et des valeurs républicaines », a-t-elle déclaré sur X au lendemain du second tour des législatives anticipées. Elle se retrouve maintenant au sein du gouvernement à un poste sans précédent : ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de la coordination gouvernementale. Sollicitée par 42mag.fr, Marie-Claire Carrère-Gée, bien que s’étant exprimée via les réseaux sociaux à l’annonce de sa nomination, n’a pas répondu à nos demandes d’interview.
Le Premier Ministre a constitué une équipe de ministres prêts à travailler ensemble, au-delà de leurs différences.
Il m’a confié la responsabilité de coordonner à ses côtés l’action gouvernementale.
Car il faut répondre rapidement aux attentes des Français et surmonter les…
— Marie-Claire Carrere-Gee (@MCCG) September 21, 2024
« Incongru » ou « utile » ?
La dénomination de son portefeuille ministériel a immédiatement généré de nombreux questionnements dans les couloirs des ministères et du Parlement. « Très étrange », commente un ancien conseiller de l’exécutif. « C’est sans précédent, voire un peu bizarre », selon un conseiller influent. « On pourrait penser que Barnier s’intéresse davantage à la coordination gouvernementale qu’aux questions cruciales pour nombre d’acteurs des secteurs », affirmait une macroniste déplorant l’absence d’un ministère spécifiquement dédié aux personnes en situation de handicap.
« Je ne sais pas à quoi elle servira, donc je préfère m’abstenir de tout commentaire », déclare sobrement un parlementaire du bloc central. « Habituellement, c’est le directeur de cabinet du Premier ministre qui s’occupe de la coordination gouvernementale », note Hervé Marseille, président du groupe centriste au Sénat, dans un entretien à Public Sénat. « Mais là, je crains que son directeur de cabinet, Jérôme Fournel, expert en finances et ancien collaborateur de Bruno Le Maire, sera très occupé avec le budget… »
« Cela pourrait être avantageux car cette coordination est traditionnellement assurée par l’Élysée. Avec cette nouvelle configuration politique, il est judicieux d’avoir quelqu’un spécifiquement dédié à cette tâche », estime Pierre Cazeneuve, député de Ensemble pour la République, qui surnomme Marie-Claire Carrère-Gée« ministre du team building ».
Faire le lien entre des ministres anciennement adversaires
Traditionnellement, Matignon veille« au bon fonctionnement et à la régularité de l’action gouvernementale », en collaboration avec le Secrétariat général du gouvernement (SGG). L’Élysée, quant à lui, dirige généralement « la coordination » des actions des ministres. Toutefois, le palais présidentiel a promis « liberté au Premier ministre », prônant une« coopération exigeante » entre les deux pôles de l’exécutif. Cela se traduirait notamment par la suppression des représentants élyséens lors des réunions interministérielles ou des conseillers partagés entre l’Élysée et Matignon.
Dans ce nouveau schéma, Marie-Claire Carrère-Gée aura pour mission« d’appliquer la méthode de gouvernance Barnier, qui valorise l’efficacité, le dialogue et le respect », selon l’entourage du Premier ministre. Concrètement, la sénatrice sera responsable de« la coordination de l’action de personnalités aux avis divergents acceptant de collaborer ». La coopération entre les ministres issus de LR et les macronistes nécessitera probablement un certain degré de souplesse entre ces deux camps qui se sont régulièrement affrontés ces dernières années.
La nouvelle ministre devra également s’assurer de« l’évaluation en temps réel des conséquences de l’action gouvernementale sur la vie des Français », d’après l’entourage du chef du gouvernement. « Avec ce ministère, nous visons à surmonter les multiples barrières gouvernementales et administratives dont la rigidité et la complexité entravent la vie des Français et paralysent le pays. » Reste à voir les ressources concrètes mises à disposition de Marie-Claire Carrère-Gée. « Il sera intéressant de voir si le décret d’attribution prévoit une administration dédiée », souligne une ancienne conseillère exécutive.