Dans le quartier de Barbès, une présence forte : celle de la communauté algérienne. Les habitants y expriment des valeurs et des racines communes. Hassan Guerrar, avec son premier film de longue durée, propose une réflexion sur la coexistence harmonieuse et les éléments susceptibles de perturber cet équilibre au sein d’une communauté.
Dans le contexte difficile de la pandémie de Covid-19, un jeune d’origine franco-algérienne se réinstalle dans le quartier de Barbès, renouant ainsi avec ses racines algériennes. C’est l’histoire centrale de Barbès, Little Algérie, le tout premier long-métrage réalisé par Hassan Guerrar, qui sort en salles le mercredi 16 octobre. Le film suit le parcours de Malek, un personnage campé par le rappeur Fianso, également connu sous le nom de Sofiane Zermani. À travers les péripéties du protagoniste, le réalisateur offre un regard sur la vie quotidienne et les dynamiques de la communauté algérienne qui habite ce quartier parisien.
Autour de l’emblématique basilique du Sacré-Cœur à Montmartre, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, une ambiance familière se dégage, un véritable « bled » pour ceux qui le connaissent. Malek le réalise encore plus intensément lorsqu’il rencontre Slimane, un ami de la famille initialement rencontré en Algérie. Cependant, Malek entretient des relations complexes avec ses proches, ces tensions remontant à la surface avec l’arrivée de son neveu Riyad, interprété par Khalil Gharbia.
Dans le quartier de Barbès, Malek se ressoude autour d’une communauté qui prend une allure de famille élargie, principalement influencée par Slimane. Parmi cette communauté, on trouve Hadria, une patronne de café au caractère bien trempé et maternellement autoritaire, rôle interprété par Adila Bendimerad, ainsi que Préfecture, le personnage malicieux joué par Khaled Benaïssa.
Immersé à nouveau dans un environnement qui lui est intime, Malek est confronté au quotidien difficile de nombreux Algériens sans papiers. Emportés par leur précarité immédiate, ils laissent derrière eux leurs compétences et talents innés.
Chronique de la vie quotidienne du quartier
La dureté des conditions de vie touche également ceux qui souffrent de pauvreté. En rejoignant une équipe de bénévoles opérant dans une église locale, Malek s’emploie à offrir de l’aide. Progressivement, il s’intègre et commence à tisser des liens avec son neveu. L’arrivée du mois de ramadan, période de jeûne observée par les musulmans en accord avec leur foi, intensifie le rapprochement entre Malek et Riyad.
Barbès, Little Algérie débute sur un ton léger, mais cette façade s’évanouit au fur et à mesure que le récit progresse. Graduellement, la nonchalance de Malek laisse place au ressentiment qu’il éprouve envers ses proches restés en Algérie, particulièrement envers son grand frère, le père de Riyad, et sa mère. Malek s’expose pleinement lorsque Hassan Guerrar le cadre, tant dans ses mouvements dans le quartier que lors des plans serrés sur ses expressions faciales et son regard.
Le réalisateur met également en lumière ces moments où les personnages se rassemblent pour capturer l’essence de la vie communautaire. Celle-ci est déclinée en une succession de scènes où les protagonistes échangent, savourent un café, où les bénévoles organisent la distribution alimentaire, ou encore où les bénéficiaires attendent leur tour. Le mouvement continue de traverser la fiction, incarné notamment par Malek, comme s’il espérait chasser ses préoccupations par le dynamisme.
Une candeur réfléchie
Pour Hassan Guerrar, qui passe de l’attache de presse à la réalisation, ce premier film concerne des thèmes qui le touchent personnellement, comme il l’a affirmé lors du dernier Festival d’Angoulême. Le quartier où se déroule l’histoire, sa double identité franco-algérienne, sa « algérité », et son engagement dans des actions caritatives nourrissent son travail. Grâce à une distribution soignée, ce premier long-métrage émane de chaleur au cœur d’un quartier vivant où le vivre-ensemble s’impose en évidence. Notamment entre chrétiens et musulmans. Les images du Sacré-Cœur, comme un protecteur silencieux des habitants musulmans dans certains plans, sont d’une beauté notable. Les choix de mise en scène de Guerrar révèlent une sensibilité qui renforce le propos qu’il soutient.
Barbès, Little Algérie paraît en France à un moment où les binationaux font l’objet d’attaques de l’extrême droite durant les élections législatives récentes et où les immigrés continuent d’être blâmés par les nationalistes qui gagnent du terrain en Europe, tandis que les tensions au Proche-Orient, dans le cadre du conflit israélo-palestinien, s’intensifient. Ces diverses tensions apportent une résonance particulière au message pacifique porté par Hassan Guerrar, qui évite cependant de tomber dans une vision naïvement idéaliste. L’intrigue de son film rappelle comment, en un instant, les relations humaines peuvent basculer brutalement vers la violence. Des frères peuvent soudainement se retrouver en opposition, laissant à la vie le soin, peut-être, de les réconcilier.

Informations utiles
Catégorie : Comédie dramatique
Réalisé par : Hassan Guerrar
Avec : Sofiane Zermani, Khalil Gharbia, Khaled Benaïssa, Adila Bendimerad, Eye Haïdara et Clotilde Courau
Pays : France
Durée : 1h33
Sortie prévue : 16 octobre 2024
Distribution : Jour2Fête
Résumé : Célibataire dans la quarantaine, Malek s’installe à Montmartre et accueille son neveu Riyad qui arrive fraîchement d’Algérie. Ensemble, ils découvrent Barbès, un quartier vibrant peuplé de la communauté algérienne, malgré la pandémie. Les rencontres que fait Malek avec les figures emblématiques du territoire lui permettent de renouer avec une partie de lui-même qu’il avait longtemps négligée et de se reconnecter à ses racines.