Rémy Heitz, en sa qualité de procureur général près la Cour de cassation, a fait part de ses préoccupations ce mardi au sujet de l’insuffisance des ressources allouées à la justice en France. Il a également répondu aux déclarations controversées de Bruno Retailleau concernant l’État de droit.
Rémy Heitz, le procureur général près la Cour de cassation, a exprimé mardi 1ᵉʳ octobre son inquiétude concernant le manque de ressources allouées à la justice en France. Selon lui, les moyens actuellement disponibles pour cette institution demeurent extrêmement insuffisants et posent un véritable problème.
Le procureur souligne qu’il n’a pas vu arriver les dotations supplémentaires promises : « Je suis préoccupé parce que des engagements ont été pris dans la loi de programmation de novembre 2023. Nous avons besoin de voir ces promesses se concrétiser, » dit-il, en faisant référence notamment à l’embauche de 1 500 magistrats supplémentaires. « On ne peut pas exiger plus de la justice qu’elle ne peut offrir, comme pour toute autre institution, » ajoute-t-il.
« La base de notre démocratie »
« S’il y a bien quelque chose qui devrait rester immuable et sacré, c’est l’État de droit, » affirme également Rémy Heitz, réagissant aux propos du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui avait déclaré que l’État de droit n’était « ni intangible ni sacré. » Ces déclarations ont suscité des inquiétudes au sein de certaines franges de la classe politique, y compris parmi les partisans de la majorité présidentielle. « Ce sont les règles qui constituent la base de notre démocratie, des règles essentielles qui sont une garantie pour tous, avec des principes absolument fondamentaux. Cela inclut la séparation des pouvoirs et l’égalité des citoyens devant la loi, » rappelle Rémy Heitz.
Rémy Heitz ne s’oppose pas à une modification de la législation pénale par les pouvoirs législatifs. « L’État de droit avec un grand ‘E’ est crucial, cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas changer la loi. On peut modifier l’état du droit avec un petit ‘e’, mais il ne faut pas toucher à l’État de droit, au contraire, il faut le renforcer, » insiste-t-il.
Le procureur met également en garde contre les dangers potentiels d’une dérive : « Dans certains régimes qualifiés d’illibéraux en Europe, on a attaqué l’État de droit et les conséquences étaient néfastes. L’État de droit, c’est un peu comme la liberté, il ne faut pas attendre de l’avoir perdu pour en regretter la disparition, » avertit-il. Rémy Heitz considère qu’il est essentiel que chacun ressente une « obligation ardente de défendre cet État de droit au quotidien. »