Paris (AFP) – Un tribunal français a condamné mercredi un ancien médecin à 27 ans de prison pour son rôle dans le génocide au Rwanda, lors du dernier procès en France pour le massacre perpétré dans ce pays africain il y a trente ans.
Eugène Rwamucyo, 65 ans, a été accusé d’avoir aidé les autorités de son pays d’alors à diffuser de la propagande anti-Tutsi et d’avoir participé à des massacres en tentant de détruire les preuves du génocide.
Le procès de Rwamucyo était le huitième en France concernant le génocide de 1994, où environ 800 000 personnes – pour la plupart des Tutsis – ont été massacrées par la majorité hutue.
L’ancien médecin, qui a exercé la médecine en France et en Belgique après avoir quitté son pays, a été reconnu coupable de complicité de génocide, complicité de crimes contre l’humanité et complot en vue de préparer ces crimes.
Il a été acquitté des accusations de génocide et de crimes contre l’humanité.
Les procureurs avaient requis 30 ans de prison.
Dans sa dernière déclaration avant le verdict, Rwamucyo a insisté sur son innocence.
« Je vous assure que je n’ai pas ordonné de tuer des survivants ni permis que des survivants soient tués », a déclaré Rwamucyo.
« Je comprends la souffrance de ceux qui recherchent toujours leurs proches… mais je ne peux pas les aider », a-t-il ajouté.
La France traduit en justice un médecin rwandais pour son rôle présumé dans le génocide de 1994
« On peut tuer avec des mots »
L’avocat de l’accusation, Nicolas Peron, a déclaré que Rwamucyo devait être acquitté de l’accusation de crimes contre l’humanité, affirmant qu’il n’existait aucune preuve démontrant que Rwamucyo avait lui-même commis des exécutions sommaires ou des actes de torture.
Mais il a déclaré dans sa déclaration finale que l’accusé ne devait pas « échapper à ses responsabilités », car « on peut tuer avec des mots ».
Rwamucyo, qui a grandi dans une famille hutue, a été approché par des militants anti-Tutsi à la fin des années 1980 après son retour d’études en Russie, selon les procureurs, qui l’accusent d’avoir ensuite diffusé de la propagande anti-Tutsi.
Alors qu’il enseignait à l’université, il a également participé à l’exécution de patients blessés et a contribué à leur enterrement dans des fosses communes « dans un ultime effort visant à détruire les preuves du génocide », a indiqué l’accusation, citant des déclarations de témoins.
Ses avocats affirment que Rwamucyo nie tout acte répréhensible et affirme que les accusations sont fondées sur son opposition au gouvernement rwandais actuel.

Sa participation à l’enterrement des corps dans des fosses communes était motivée par le souhait d’éviter une « crise sanitaire » qui se serait produite s’ils avaient été laissés à l’air libre, ont indiqué les avocats.
Suite à un mandat d’arrêt international émis par le Rwanda, Rwamucyo a été arrêté en mai 2010 par la police française suite à une dénonciation de ses collègues de l’hôpital de Maubeuge, dans le nord de la France, où il travaillait à l’époque.
« Il était ouvertement anti-Tutsi et a publiquement exprimé son soutien au gouvernement génocidaire », a déclaré Emmanuel Daoud, avocat de la LDH et de la FIDH, deux organisations de défense des droits de l’homme qui font partie des plaignants.
En décembre 2023, un tribunal français a condamné un autre ancien médecin, Sosthène Munyemana, à 24 ans de prison pour son implication dans le génocide de 1994.
(AFP)