Le ministre de l’Intérieur prévoit de soumettre un nouveau projet de loi sur l’immigration, le 33e en 44 ans. Ce texte vise à allonger la durée de séjour des étrangers en situation irrégulière dans les centres de rétention administrative, s’ils sont jugés « dangereux ».
« Ce n’est pas une initiative très judicieuse et cela peut être contre-productif à bien des égards », critique ce lundi 14 octobre sur 42mag.fr David Robert, qui est à la tête de l’association J’accueille, spécialisée dans les démarches d’accueil et d’hébergement des réfugiés. Ces propos font suite à l’annonce récente faite par Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, d’une future loi sur l’immigration prévue pour le début de l’année 2025. Ce projet de loi sera le 33e du genre depuis l’année 1980.
Cette déclaration intervient juste un an après l’entrée en vigueur de la dernière législation sur l’immigration, en janvier 2024, qui avait suscité de vifs débats au sein du Parlement. L’objectif de ce nouveau texte est, selon Maud Bregeon qui s’est exprimée dimanche sur BFMTV, de « faciliter l’allongement de la durée de détention des étrangers en situation irrégulière et présentant des profils dangereux dans les centres de rétention administrative ». Bruno Retailleau propose d’étendre la période maximale de détention de 90 jours à 210 jours. David Robert rétorque que seules « 5% des obligations de quitter le territoire français (OQTF) dépassent actuellement 60 jours. Ainsi, l’allongement de cette période ne contribuera en rien à la sécurité supposée que l’on souhaite instaurer ».
Une vision éloignée des enjeux économiques
Cette initiative gouvernementale fait suite à l’émoi suscité par le dramatique incident impliquant une étudiante nommée Philippine, qui a été victime de viol et de meurtre dans le bois de Boulogne à Paris, son agresseur étant un individu qui était en centre de rétention avant d’être relâché malgré une décision d’expulsion. David Robert compare cette approche à celle de Donald Trump, qui associe souvent immigration et délinquance dans ses discours, même si « 99% des immigrants en France souhaitent pouvoir vivre paisiblement et s’intégrer dans leur société ». Il déplore que l’immigration soit systématiquement liée à des problèmes, qualifiant cette vision de regrettable. Il juge aussi que Bruno Retailleau est « quelque peu déconnecté des réalités économiques », s’appuyant sur les propos de Patrick Martin, président du Medef, qui avait souligné « un besoin considérable de main-d’œuvre » lors des discussions sur la loi immigration soutenue par Gérald Darmanin.
Bruno Retailleau a également convié mardi à Beauvau une vingtaine de préfets pour discuter des enjeux migratoires. Il envisage de leur donner des directives claires et de remplacer la circulaire Valls de 2012, qui « autorise la régularisation d’individus occupant un emploi ou dont les membres de la famille travaillent dans deux tiers des cas. En ces temps où l’on cherche le moindre centime pour établir un budget équilibré, on empêche ces travailleurs de s’acquitter de leurs impôts et leurs employeurs de payer des cotisations. C’est tout simplement absurde », se lamente-t-il.