Juste avant que son nouveau projet prenne vie sur scène, une œuvre musicale aux accents cinématographiques, le chorégraphe talentueux nous a permis d’assister à une répétition en compagnie de trois de ses danseurs. Il partage avec nous sa passion pour ce métier qu’il chérie tant.
Un retour très attendu pour Benjamin Millepied
Deux ans après sa version inclusive de Roméo et Juliette et un an après la sortie de son premier film Carmen, Benjamin Millepied, le célèbre danseur et chorégraphe, revient avec une nouvelle production intitulée : Grace, Jeff Buckley Dances. Tout comme en 2022, il présentera sa dernière œuvre à La Seine Musicale de Boulogne-Billancourt, du 5 au 10 novembre 2024.
Dix jours avant le lancement du spectacle, Millepied nous accueille dans un studio parisien proche des Grands Boulevards, où il met les touches finales à son spectacle. Tandis que ses danseurs s’échauffent déjà, il arrive avec sa fille à ses côtés, profitant des vacances scolaires. En portant un jean baggy, un t-shirt et des baskets, il démarre la session. « Commençons doucement, » dit-il pour débuter.
Une ambiance musicale unique
La musique de Jeff Buckley remplit le studio avec ses mélodies déchirantes : « If you knew how I miss you« . Sur cette pièce très chère à son cœur, Millepied a élaboré un duo passionné et pénétrant. « C’est une mélodie aérienne, presque en apesanteur pour moi. Elle possède une sorte de magie qui se prête naturellement à la danse« , explique-t-il.
Coline Omasson et David Freeland se concentrent intensément sur ce duo, sous le regard vigilant et bienveillant de leur chorégraphe. Pour cette nouvelle production, Millepied a sélectionné douze danseurs, chacun apportant un talent unique pour capturer ce qu’il appelle « l’univers de Buckley« . « Quelques danseurs sont déjà familiers, mais pour les autres, j’ai effectué des auditions en rencontrant des talents recommandés« , ajoute-t-il en plaisantant.
Des mois de préparation intensive
Ex-danseur vedette du New York City Ballet dans les années 2000, Millepied maîtrise parfaitement sa chorégraphie. D’un rôle à l’autre, d’une langue à une autre, il navigue sans effort. « Imagine que tu chantes pour elle, » explique-t-il à David en anglais avant de se tourner vers Coline pour ajuster sa position. Pour illustrer, il danse dans les bras de David.
Les répétitions ont commencé en décembre 2023, avec des séances en mars, puis tout au long du mois de mai, et enfin en octobre, se traduisant par une préparation de plus de trois mois et demi. Millepied, admirant le résultat, murmure : « Ils sont formidables ! Ça va être magnifique ! »
La créativité au cœur de chaque pas
Chacune de ses créations commence par un travail écrit, qu’il réalise en dansant, prend le temps de consulter ses danseurs sur les mouvements. Millepied cherche un équilibre entre sa vision et la réalisation pratique. « Ça te va ?« , demande-t-il régulièrement, notamment à Coline, qui souffre du dos ce jour-là, ajustant les mouvements en fonction de leur retour.
Il exige que ses danseurs répètent chaque séquence comme s’ils étaient sur scène : « C’est crucial. Le corps doit mémoriser pour pouvoir gérer les imprévus« . Il est souvent émerveillé par la performance de ses interprètes. « Quand un danseur s’approprie et transcende une chorégraphie, c’est une expérience sublime pour moi. C’est ce qu’on recherche constamment, » confie-t-il.
Une interprétation inédite et éclatante
Durant une pause, Eva Galmel entre en scène pour un solo à la fois rock et magistral. Talents de Millepied, elle rayonne d’une grâce et d’une énergie exceptionnelles. Si elle a déjà maîtrisé sa danse, Millepied lui conseille de jouer davantage avec l’expression de ses mains. « Utilise-les plus, elles doivent être le prolongement expressif de ton corps, » explique-t-il.
Pour les derniers ajustements, il propose un changement de mise en scène : « En début de séquence, enlever quelque chose comme un manteau pourrait être intéressant. » À dix jours du spectacle, il se montre confiant quant aux préparatifs. « Cette semaine a été particulièrement fructueuse« , dit-il satisfait.
Aimer son travail, une évidence pour Millepied
Millepied, qui compte à ce jour environ cinquante ballets, confirme son amour inchangé pour le métier. « Travailler sur des projets stimulants, passionné par la musique, c’est un plaisir constant« , dit-il. Déjà pris par un autre projet futur, il se nourrit de cette anticipation.
Malgré une carrière prolifique, les doutes ont diminué. « Les moments difficiles sont rares; l’expérience facilite la gestion des épreuves. Plus mûr, je trouve désormais beaucoup de plaisir dans ce que je fais« , partage-t-il. « Profiter des plaisirs simples, comme traverser Paris à vélo, rappelle la magie de ce métier et la chance de pouvoir faire ce que j’aime. »
Hommage à Jeff Buckley
Pendant une pause, il exprime son admiration pour Jeff Buckley, dont il a été fan depuis toujours. Le musicien talentueux a tragiquement disparu en 1997, à seulement 30 ans. Pour Millepied, il ne s’agit pas de raconter la vie de Buckley, mais de célébrer sa musique. « Il avait une aura, un magnétisme fascinant, » affirme-t-il.
Un défi chorégraphique sur « Hallelujah »
Les chansons de Buckley, y compris celles de l’album Grace, structureront le spectacle, accompagnées de jeux de lumière et de vidéos. Cette production se veut quasiment expérimentale, et sa reprise d’Hallelujah, une pièce maîtresse, a représenté un véritable défi. Il a fallu du temps à Millepied pour trouver la bonne chorégraphie, qui doit rehausser la musique sans en faire trop.
Fort de son expérience, Millepied sait que dans la simplicité réside la complexité véritable. « Créer des choses simples requiert souvent une expertise approfondie« , conclut-il.
Le spectacle Grace, Jeff Buckley Dances sera présenté à La Seine Musicale de Boulogne-Billancourt du 5 au 10 novembre 2024 à 20h30. Une reprise aura lieu aux Nuits de Fourvière à Lyon, les 17 et 18 juin 2025.