Les quatre syndicats de la compagnie ferroviaire française SNCF appellent à une grève générale et à des marches de protestation jeudi, avant une grève tournante à la mi-décembre. Ils sont mécontents du projet de démantèlement des opérations de fret et d’ouverture des lignes régionales à la concurrence.
Après une première journée de grève jeudi, les syndicats CGT-Cheminots, Unsa-Ferroviaire, Sud-Rail et CFDT-Cheminots ont annoncé que la grève renouvelable et illimitée débuterait le 11 décembre.
« Il y a beaucoup de colère et de frustration. Certains d’entre nous sont prêts à se battre, nous nous sentons plutôt déprimés », selon Sébastien Mourgues, secrétaire régional de la CGT Languedoc Roussillon.
« Nous tirons la sonnette d’alarme et nous voulons de vraies négociations », a-t-il déclaré mercredi sur Franceinfo.
« Nous avons fait une série de propositions et nous demandons un débat parlementaire pour que les décisions prises ne soient pas unilatérales. »
Même si les syndicats espèrent une forte participation, la SNCF a indiqué que le trafic serait quasiment normal sur les TGV, précisant qu’il y aurait quelques perturbations sur les lignes régionales avec sept trains TER sur dix en moyenne.
Les trains interurbains devraient être concernés avec seulement un train sur deux en circulation, et aucun train de nuit.
En Ile-de-France, les perturbations seront limitées et se concentreront principalement sur le RER D et la ligne R du Transilien, fiefs du syndicat Sud-Rail, avec seulement un train sur trois.
Ces dernières semaines, les syndicats ont critiqué la poursuite du bouleversement de l’opérateur ferroviaire, fustigeant la « fragmentation » du réseau.
La semaine dernière, Julien Troccaz, secrétaire fédéral de Sud-Rail, qualifiait d’alarmantes les évolutions du secteur du fret.
« Nos collègues ne savent pas ce qui va se passer le 1er janvier. Ils savent qu’ils vont travailler pour des entreprises privées, mais ils ne savent pas quels sont leurs droits sociaux. »
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En 2023, la Commission européenne a annoncé une enquête approfondie pour déterminer si la France avait enfreint les règles de l’UE en matière de soutien d’État en subventionnant la division fret de la SNCF.
Le gouvernement français a lancé un processus de restructuration qui verra le remplacement de la première entreprise française de fret ferroviaire en janvier prochain par deux sociétés distinctes, Hexafret et Technis.
Ce plan a été négocié par le gouvernement français et la Commission européenne pour éviter une procédure de réorganisation qui aurait pu conduire à la liquidation pure et simple de l’entreprise, qui emploie 5 000 personnes.
Les syndicats ont déclaré : « Un moratoire est possible et nécessaire pour permettre aux différents acteurs de se remettre à la table et de trouver les moyens de garantir non seulement la continuité de Fret SNCF, mais aussi son développement sur le long terme. »
Réorganisation, compétitivité
Un autre point de discorde concerne l’ouverture des lignes régionales à la concurrence.
Mourgues a expliqué que cette privatisation entraînerait le transfert du personnel de la SNCF vers des filiales et aurait pour effet de dégrader les conditions sociales des cheminots.
Le 14 décembre, environ 1 200 cheminots d’Amiens, Nice et Nantes seront transférés de SNCF Voyageurs vers les entreprises ayant remporté les appels d’offres lancés par les régions pour le marché des trains régionaux TER.
Les cheminots transférés conserveront certains avantages comme les droits à la retraite et les indemnités de déplacement mais connaîtront également une réorganisation de leur temps de travail, afin d’augmenter la productivité.
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« Il y a une très forte conscience (parmi les cheminots) que ces changements structurels ne vont évidemment pas dans le bon sens », a déclaré le secrétaire général de la CFDT-Cheminots, Thomas Cavel.
Le PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, a insisté sur le fait que le processus était en cours depuis de nombreuses années et que les négociations sociales étaient bien avancées.
« Les Français ne comprendraient pas une grève longue et dure en décembre », a-t-il déclaré dans un entretien au Journal du dimanche. La Tribune Dimanche.
Privatisation
En 2018, le président Emmanuel Macron s’est adressé aux puissants syndicats de la SNCF pour faire adopter une refonte qui priverait les salariés de l’emploi à vie et des garanties de retraite, tout en promettant de relancer les lignes plus lentes.
Les patrons travaillistes ont qualifié cela de premier pas vers la privatisation. Ils ont organisé des grèves massives dans les transports, mais n’ont pas réussi à faire dérailler la réforme.
Les mouvements sociaux à la SNCF ont perturbé à plusieurs reprises les déplacements pendant les vacances scolaires.
En février, les contrôleurs ferroviaires se sont mis en grève pendant un week-end férié, laissant 150 000 personnes bloquées.
Une grève de Noël en décembre 2022 a touché quelque 200 000 vacanciers.