Lors de son audition, l’ex-Premier ministre a eu plusieurs échanges animés avec Jean-François Husson, sénateur Les Républicains et rapporteur général du budget.
Ancien dirigeant du gouvernement, Gabriel Attal a affirmé le 8 janvier devant le Sénat, lors d’une enquête sur les finances publiques en difficulté, qu’il avait pris des « décisions significatives » pour freiner la détérioration du déficit. Le déficit, initialement prévu à 4,4% dans la loi budgétaire adoptée l’automne précédent, avait été revu à la hausse à 5,1% par l’ancien gouvernement au printemps. Le nouvel exécutif envisage désormais un déficit de 6,1% pour 2024.
Devenu leader des députés d’Ensemble pour la République, Gabriel Attal a énuméré les mesures mises en place par son équipe en réponse aux alertes concernant la situation des finances publiques. Parmi ces décisions, il a mentionné la majoration de la taxe sur l’électricité en janvier, l’annulation de 10 milliards d’euros de crédits en février et le doublement des franchises médicales. « Je ne pense pas qu’un autre gouvernement ait proposé, identifié et réalisé autant d’économies dans un tel laps de temps », a-t-il précisé.
« Tout part à vau-l’eau »
Des échanges intenses ont eu lieu entre l’ancien Premier ministre et le rapporteur général du budget au Sénat. « Tout part à vau-l’eau ! Quand il y a un écart de 50 milliards en neuf mois, (…) cela traduit un manque de discipline budgétaire », a lancé le sénateur Jean-François Husson, appartenant au parti Les Républicains. Ce dernier a critiqué Gabriel Attal pour avoir causé un « nombre important de dépenses ». « Dressez-moi la liste des dépenses » qui ont « entraîné la détérioration du budget 2024 », a rétorqué l’ancien chef du gouvernement.
Comme Bruno Le Maire, entendu la veille par le Sénat, Gabriel Attal attribue en grande partie l’actuelle situation budgétaire à une « baisse abrupte des recettes ». Il a également jugé « scandaleux » le « procès politique et médiatique » intenté à son ancien ministre de l’Économie, accusé de « manque de transparence » et de « manipulation » vis-à-vis du Parlement à propos de la situation financière. « Je n’ai toujours vu qu’un ministre de l’Économie et des Finances très attentif à la responsabilité des comptes de la France, » a-t-il argué.
« Nous n’avons jamais ignoré la réalité de la situation et les informations qui nous parvenaient. »
Gabriel Attal, ancien Premier ministredevant les sénateurs
Gabriel Attal a également expliqué pourquoi il n’avait pas proposé un projet de loi de finances rectificative (PLFR) au printemps, malgré les conseils de Bruno Le Maire. L’ancien Premier ministre comptait s’appuyer sur d’« autres projets de loi » au cours de l’année : le budget pour 2025, où il souhaitait introduire des « mesures fiscales rétroactives » sur la taxation des superprofits des énergéticiens et le rachat d’actions, ainsi qu’une loi de finances de fin de gestion. Ces plans ont été rendus caducs par la dissolution en juin et la démission du gouvernement.
Gabriel Attal nie tout lien entre ses choix et le calendrier électoral
Il affirme que la décision de ne pas introduire de PLFR au printemps visait également à préserver du « temps parlementaire » pour aborder d’autres dossiers, comme un projet de loi sur l’agriculture et les débats sur la fin de vie. Gabriel Attal a démenti toute corrélation entre cette décision et les élections européennes en juin. « Vous affirmez que les européennes n’ont rien à voir, mais le Premier ministre est par définition le leader de la majorité. Vous devez tenir compte du climat politique lors de vos décisions », lui a rétorqué Claude Raynal, président de la commission des finances et sénateur socialiste.
Enfin, Gabriel Attal, tout comme son ancien ministre de l’Économie, estime qu’il est possible de ramener le déficit à un niveau inférieur à celui envisagé par le gouvernement de Michel Barnier. L’ancien Premier ministre a souligné avoir laissé à son successeur « un ensemble de mesures » d’économies prêtes à être mises en œuvre, évoquant des annulations de crédits supplémentaires et des pistes concernant la Sécurité sociale. « Il appartient au nouveau gouvernement de décider de mettre en place ces mesures », a-t-il estimé.
Une défense que Jean-François Husson a qualifiée d’« inélégante » et « non fair-play ». « Je ne dis pas ‘voilà ce que le gouvernement aurait dû faire’, je dis ‘voilà ce que mon gouvernement aurait fait s’il n’avait pas été dissous et si nous n’avions pas dû démissionner' », a souligné Gabriel Attal, affirmant « accepter les responsabilités qui étaient les nôtres ». Le Sénat doit poursuivre ses travaux en auditionnant sa prédécesseure, Élisabeth Borne, le 15 novembre.