Dans ce premier film de longue durée, John Wax confie à l’actrice Audrey Lamy un rôle saisissant de femme et mère, confrontée au défi de mûrir pour soutenir le développement de son fils autiste.
Un récit touchant et personnel mis en lumière
Inspiré par le monologue autobiographique de Marie-Odile Weiss, montré au festival d’Avignon, le film En tongs au pied de l’Himalaya arrive sur grand écran le 6 novembre. Ce long-métrage plonge dans le quotidien de Pauline, la mère d’Andrea, un petit garçon autiste qui vit une période décisive, celle de sa dernière année de maternelle. Après cette étape, son avenir scolaire reste incertain, dépendant de sa capacité à suffisamment s’autonomiser pour continuer en école classique.
Des défis quotidiens pour une mère célibataire
Pauline, une quadragénaire récemment séparée, habite provisoirement chez son frère, qui, immature, ne facilite pas vraiment la situation. Travaillant dans un bar la nuit, elle a pris l’habitude de boire plus que de raison après son service, ce qui complique son rôle de mère prête à épauler Andrea pour une transition réussie vers le primaire.
Audrey Lamy et ses motivations profondes
Audrey Lamy a partagé avec 42mag.fr son enthousiasme pour ce premier film signé John Wax. Ce projet aborde délicatement le thème sensible de l’autisme, tout en gardant un ton de comédie réaliste loin du mélodrame.
42mag.fr Culture : qu’est-ce qui vous a attiré dans le scénario à sa réception ?
Audrey Lamy : Absolument tout m’a plu ! (rires) Connaissant John Wax grâce à un précédent travail commun sur Coexister de Fabrice Éboué en 2017, nous formions déjà une équipe solide. Il avait promis de m’écrire un rôle, et quelques années plus tard, en plein déménagement avec des cartons autour de moi, le téléphone a sonné. Il m’annonçait qu’il avait un scénario pour moi, intitulé En tongs au pied de l’Himalaya. Dès que j’ai commencé à le lire, j’ai laissé de côté mes cartons. En deux heures, j’avais dévoré le texte et je l’ai recontacté immédiatement pour lui dire un grand oui. Jamais je n’ai été aussi prompte à accepter un projet.
Un scénario séduisant avec un équilibre délicat
Ce qui m’a captivée, c’est avant tout la trame narrative. Lorsqu’un scénario m’est proposé, la première chose que j’évalue est l’histoire elle-même. Est-ce une histoire que j’ai envie de narrer et dans laquelle je me projette ? Ici, l’équilibre était parfait. Le sujet bien que subtil, est traité avec un mélange de rire, d’amour et d’optimisme. Loin de vouloir tirer les spectateurs vers la tristesse, le récit injecte de l’espoir et de la légèreté.
"On n’est pas dans le pathos, on n’est pas en train de traiter le sujet en prenant en otage les spectateurs ou le public."
Les personnages secondaires apportent de la légèreté, comme le frère interprété brillamment par Benjamin Tranié. Tous les acteurs sont remarquables, et l’injection d’humour autour d’un sujet délicat permet de susciter la réflexion et l’empathie, menant à une vraie introspection.
42mag.fr Culture : Selon vous, ce film aide-t-il à rendre le sujet moins pesant ?
Le film n’élude pas la gravité, mais préfère présenter une réalité authentique et non pesante. Basé sur le spectacle de Marie-Odile Weiss qui interprétait son propre vécu, l’importance était de montrer les moments difficiles tout autant que les instants de bonheur, de rire et d’amour.
Préparation méticuleuse pour un rôle authentique
Oui, j’ai longuement échangé avec Marie-Odile, rencontré de nombreux parents et écouté des podcasts éclairants. Je me suis documentée abondamment, réalisant que mon ignorance était initialement totale. L’autisme présente une variété aussi large que le spectre humain.
Implication de Marie-Odile Weiss
Marie-Odile, toujours présente sur le plateau, était essentielle pour s’assurer de l’authenticité des scènes. Son rôle fut crucial pour tirer le meilleur de nous et rendre crédible chacune des performances, notamment celle du jeune Eden jouant Andrea.
42mag.fr Culture : Collaborer avec un jeune acteur doit être exigeant, n’est-ce pas ?
Effectivement, non seulement parce que le rôle est complexe, mais choisir un enfant qui pourrait l’incarner était délicat. Avec Eden, il fallait naviguer entre la finesse des gestes et l’intensité du jeu, ce qu’il a réalisé avec brio.
"Il fallait trouver un enfant qui ait un talent monstre parce qu’il a tellement de choses à jouer, que ce soit dans la diction, dans la gestuelle, dans le regard qui se perd, dans le texte, dans les gestes à répétition. C’est vraiment de la dentelle."
Apprentissage au fil des jours, Eden a rencontré le fils de Marie-Odile et a été encadré sur le tournage. Notre relation mère-fils dans le film s’est construite sur une complicité réelle. Présent sur le plateau, Eden ne s’est jamais plaint de la lourdeur des journées.
42mag.fr Culture : Comme un véritable acteur aguerri ?
Assurément. Sans jamais être fatigué, Eden faisait montre d’un professionnalisme étonnant. Son enthousiasme et sa capacité à améliorer chaque prise prouvent son talent remarquable.
42mag.fr Culture : Un rôle exigeant tant pour lui que pour vous ?
Ce film soulève des questions importantes pour toute la famille autour de l’autisme, élargissant le portrait au-delà d’une simple mère. C’est le chemin de Pauline, une femme imparfaite mais qui apprend à se découvrir à travers son fils.
"J’ai adoré le fait qu’elle ne soit pas parfaite, qu’elle fasse des erreurs, qu’elle s’y prenne mal mais qu’on lui pardonne parce qu’on la comprend."
En s’attaquant à leurs propres obstacles, on voit une famille face à ses responsabilités envers Andrea.
Libération mutuelle à travers la relation mère-fils
L’évolution conjointe de Pauline et Andrea montre que les enfants, parfois, éduquent les parents. Cette dynamique apportée à l’écran parle aux familles directement concernées par l’autisme.
42mag.fr Culture : Qu’en est-il de la représentation de la différence au sens large ?
Le film évoque non seulement l’autisme mais aussi l’effort nécessaire pour accepter et comprendre la différence chez tout un chacun. Il nous encourage à la compassion et nous rappelle que de telles situations peuvent frapper n’importe qui.
42mag.fr Culture : Avez-vous puisé dans votre rôle de mère personnellement ?
En tant que maman de deux enfants, j’explore mes propres inquiétudes concernant leur intégration sociale et protection. Je comprends le combat maternel de Pauline, prête à tout pour préserver le bien-être de son enfant face aux railleries et injustices.
"Si une maîtresse avait décidé d’exclure mon enfant du spectacle de fin d’année parce qu’il ne sait pas danser ou chanter, moi aussi je crois que j’aurais pété un plomb."
À travers sa vision déterminée, Pauline montre la lutte incessante pour l’acceptation de son enfant, reflétant intimement mes propres craintes et espoirs en tant que parent.