Les ministres français de l’Intérieur et de la Justice se sont rendus vendredi à Marseille pour diriger la réponse du gouvernement à la crise de la drogue qui alimente la violence des gangs à travers le pays.
Le commerce illicite de drogues, dont on estime aujourd’hui qu’il génère entre 3,5 et 6 milliards d’euros par an, a provoqué de violentes guerres intestines entre réseaux criminels rivaux.
À Marseille, où les règlements de comptes entre gangs sont particulièrement meurtriers, les autorités sont alarmées par l’implication croissante de tueurs à gages adolescents âgés d’à peine 14 ans.
« L’État perd son emprise. Ce n’est qu’une question de jours avant qu’un maillon de la chaîne judiciaire soit enlevé ou tué », a déclaré à l’AFP un avocat spécialisé dans les affaires liées à la drogue.
Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et le ministre de la Justice Didier Migaud ont été chargés par le Premier ministre de donner « des directives claires pour une mobilisation immédiate et des moyens accrus », selon le quotidien français. Le Figaro signalé.
Retailleau a promis une « guerre longue et implacable » contre le trafic de drogue, avec une nouvelle législation attendue début 2025, abordant ce qu’il décrit comme la « mexicanisation » de la France.
Il souhaite que le gouvernement reprenne et renforce les propositions d’une enquête sénatoriale sur l’impact des stupéfiants.
Migaud, faisant écho à la position de Retailleau, a appelé à une « réponse très ferme de la part de l’État » dans le cadre d’une approche essentiellement sécuritaire des problèmes liés à la drogue depuis plus de 30 ans.
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« La violence engendre la violence »
L’engagement de Retailleau en faveur de mesures plus strictes n’a pas été sans critiques.
« Il y a une tendance générale en faveur de politiques répressives. Mais si nous n’adaptons pas les sanctions, les problèmes ne seront pas résolus », a déclaré à l’AFP un magistrat qui a beaucoup travaillé sur les affaires de stupéfiants.
Il a averti que « la violence engendre la violence » et a critiqué les précédentes opérations antidrogue très médiatisées, telles que l’initiative « Place nette XXL » de l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, une opération à grande échelle lancée par le gouvernement pour lutter contre le trafic de drogue et renforcer la sécurité publique. à Marseille – le qualifiant de « pur spectacle » qui n’a pas réussi à résoudre les problèmes fondamentaux.
« C’est comme chasser des pigeons, on ne s’en débarrasse pas. C’est juste un spectacle politique », a déclaré le magistrat.
Certains décideurs politiques sont favorables à l’élargissement des pouvoirs de l’agence française de lutte contre les stupéfiants, Ofast, suggérant qu’elle pourrait fonctionner davantage comme la Drug Enforcement Administration (DEA) fédérale aux États-Unis.
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Mais d’autres affirment que le rôle de l’Ofast dans les affaires judiciaires est déjà étendu et que des pouvoirs supplémentaires pourraient entrer en conflit avec la structure juridique française, qui place le contrôle judiciaire sous l’autorité des procureurs et des juges d’instruction.
Les événements récents soulignent l’ampleur de la crise, comme l’évasion du criminel de premier plan Mohamed Amra – qui a vu la mort de deux gardiens de prison – et une « conférence de presse » publique du gang DZ Mafia de Marseille. Celles-ci illustrent que « les institutions ne sont plus sécurisées », a déclaré à l’AFP un expert judiciaire.
L’ancien ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, avait déjà proposé l’idée d’un parquet national spécialisé en matière pénale – une idée qui a suscité un certain soutien.
Migaud a reconnu que cela « pourrait être une solution », mais a déclaré qu’en fin de compte, la décision devrait être laissée au Parlement.