Dans « Rabia », Megan Northam et Lubna Azabal s’engagent dans un duel intense centré sur la radicalisation. Dans une entrevue accordée à 42mag.fr Culture, les deux actrices décrivent les raisons qui les ont poussées à participer à ce projet ambitieux et partagent leurs expériences face aux personnages complexes qu’elles ont incarnés.
Un Duo Puissant entre Megan Northam et Lubna Azabal dans « Rabia »
Dans « Rabia », le premier long-métrage de Mareike Engelhardt, Megan Northam et Lubna Azabal incarnent respectivement Rabia et Madame, deux personnages complexes explorant les thèmes de la radicalisation et de l’exploitation par le groupe terroriste Daech. Ce film aborde comment de nombreuses jeunes filles tombent sous l’emprise de ce groupe extrémiste, offrant aux deux actrices une chance unique de déployer leur talent.
Quelle est la motivation derrière ces rôles forts ?
Megan Northam : Habiter un personnage aussi riche est un véritable cadeau pour une actrice. Construire un rôle, c’est non seulement interpréter un personnage écrit, mais aussi créer des liens entre lui et notre propre identité. Ce qui m’a particulièrement attirée, c’est que Rabia est tellement éloignée de ma propre réalité, notamment à travers son périple vers la Syrie. Pour moi, c’était un défi de m’immerger dans une réalité extérieure à la mienne, sans porter de jugement. Ma rencontre avec de jeunes filles ayant vécu ces expériences a été décisive. J’ai vite abandonné l’idée de juger pour mieux comprendre leur parcours de vie. C’est ce désir de prendre des risques qui m’a motivée à m’impliquer dans ce projet.
Lubna Azabal : Pour des actrices comme nous, des rôles aussi profonds sont exceptionnels. Jouer ce personnage a représenté un défi, surtout dans sa complexité mêlant mal, pouvoir et affaires. Madame est cette femme d’affaires impitoyable, exploitant les jeunes filles pour son profit. Dès qu’une jeune fille est mariée, ou plutôt abusée, elle en tire bénéfice. C’est le fonctionnement typique des grandes sectes où l’autorité dicte chaque aspect de la vie des recrues. Le cerveau est lavé, l’individu devient docile, et Madame symbolise une telle manipulation maléfique.
Le contraste entre Madame et Amal
Lubna Azabal : Lorsque j’ai discuté avec Mareike, j’avais une condition claire : ne pas susciter d’empathie pour Madame. Je voulais l’exagérer pour exposer sa folie. Par contraste, le personnage d’Amal que j’ai interprété dans le passé se réfère à des incidents modernes comme l’affaire Samuel Paty, et c’était crucial pour moi, ayant des racines musulmanes, de représenter cette réalité, cet équilibre entre la tradition et la modernité.
L’impact physique du rôle de Rabia sur Megan Northam
Megan Northam : Jouer des rôles physiques et mentalement exigeants peut affecter profondément, comme je l’ai expérimenté précédemment. Après un tournage éprouvant avec Klapisch et une autre production exigeante, j’approchais de l’épuisement. J’ai presque abandonné « Rabia » à cause de cet état de fatigue extrême. Mais finalement, j’ai rejoint le plateau malgré mon épuisement, curieuse de découvrir les limites humaines en situations intenses. À la suite de ce tournage, j’ai traversé une période difficile, mais différente à chaque projet. Dans tout rôle, je mets tout mon être, même au risque d’épuisement physique.
Exploration des rapports de pouvoir dans « Rabia »
Lubna Azabal : Les interactions entre nos personnages n’ont pas été répétées au préalable. Cette spontanéité a renforcé l’authenticité de Rabia qui découvre Madame, et inversement, de Madame observant Rabia avec dureté. Notre passion commune pour le métier a nourri cette dynamique.
Megan Northam : Collaborer avec une actrice d’expérience comme Lubna est inspirant. Sa passion sur le plateau est contagieuse. Elle a apporté une immense générosité durant le tournage, créant une ambiance de travail solidaire.
Lubna Azabal : Nous avons créé une forte connexion. Megan, malgré les moments difficiles, a montré une grande résilience. Elle me rappelle parfois moi-même, se donnant pleinement sans réserve.