Il est fort probable que son film le plus récent, réalisé secrètement en Iran, soit inclus dans la liste des longs-métrages en compétition pour l’Oscar du Meilleur film international. Cette sélection sera annoncée en janvier 2025.
Après avoir quitté l’Iran de manière précipitée, Mohammad Rasoulof voit l’un de ses films représenter l’Allemagne aux Oscars : un symbole de renouveau pour le cinéaste, mêlant satisfaction et poids de la situation pour obtenir une reconnaissance artistique. Son thriller, Les graines du figuier sauvage, tourné clandestinement en Iran, a conquis la critique en remportant le prix spécial du jury à Cannes.
La République islamique à Téhéran a cependant décidé de ne pas soumettre ce portrait d’une famille en crise sous la pression du régime iranien pour l’Oscar du meilleur film international. « Il est inimaginable que la République islamique propose un tel film aux Oscars« , affirme Mohammad Rasoulof à l’AFP avant sa sortie aux États-Unis prévue le 27 novembre. « Si cela avait été envisageable, ce film n’aurait jamais pu voir le jour.«
Des sentiments mitigés pour le réalisateur
C’est finalement l’Allemagne, pays d’exil du cinéaste, qui propulse ce film dans la course aux Oscars, avec de fortes chances d’obtenir une nomination. Les films retenus par l’Académie des Oscars seront annoncés le 17 janvier 2025, avec la cérémonie prévue pour le 2 mars. Le financement du film vient de collaborations avec des sociétés de production françaises et allemandes.
« Je suis très heureux que l’Allemagne ait saisi la portée universelle du film et lui ait apporté son soutien« , souligne Mohammad Rasoulof. « C’est un peu comme devenir porteur de torche, un message d’espoir pour les cinéastes opérant sous la contrainte dans le monde. » Mais il reconnaît également se sentir « doux-amer » face à la situation. « Mes sentiments sont réellement partagés. » Le film se situe lors de la répression du mouvement « Femme, Vie, Liberté », qui a vu des centaines de morts, d’après les ONG. L’histoire suit Iman, un magistrat de la République islamique, au moment où la contestation s’intensifie après la mort de Mahsa Amini fin 2022, appréhendée pour ne pas avoir respecté le code vestimentaire religieux.
L’Iran demeure dans son cœur
À la première du film à Cannes, Mohammad Rasoulof venait tout juste de quitter l’Iran clandestinement à travers les montagnes pour rejoindre l’Europe. Ce réalisateur, ayant déjà connu l’incarcération, avait été condamné à huit ans de prison pour « conspiration contre la sécurité nationale« , suite à ses accusations de « corruption » et « d’incompétence » à l’encontre des autorités iraniennes. L’actrice Soheila Golestani, qui incarne Nameh, la mère du film, est toujours en Iran et subit « une pression immense« , rappelle-t-il.
L’œuvre que l’Iran a proposé pour les Oscars est In The Arms Of The Tree. Les médias officiels le présentent comme un drame illustrant « les beautés » du pays et célébrant « l’authenticité familiale iranienne« . Pour l’instant, le cinéaste planche sur un projet d’animation inspiré par Abbas Nalbandian, dramaturge militant qui « a vécu des moments cruciaux autour de la révolution » iranienne. » « C’est un crève-cœur de réaliser que cela dure depuis six mois« , confie-t-il. « L’Iran me manque énormément.«