Chaque jour, Élodie Suigo accueille une nouvelle personnalité sur son plateau. Le mardi 17 décembre 2024, c’est au tour de l’actrice et photographe Audrey Tautou de se joindre à elle. Elle vient de sortir un ouvrage intitulé « Superfacial », qui rassemble ses photographies accompagnées de réflexions personnelles, édité par Fisheye.
Audrey Tautou : un parcours atypique vers la renommée
En 2016, Audrey Tautou a revisité la chanson La Mauvaise réputation de Georges Brassens, trouvant dans ses paroles un écho à sa propre perspective de la vie, qui n’a jamais vraiment suivi les sentiers battus. Sa carrière s’est lancée grâce à Tonie Marshall qui lui a offert un rôle dans Vénus Beauté (institut), une prestation qui lui a valu le César du meilleur espoir féminin en 2000. Jean-Pierre Jeunet a ensuite misé sur elle, la propulsant sur la scène internationale avec son interprétation dans Le fabuleux destin d’Amélie Poulain. Ce film a marqué un tournant décisif, introduisant Tautou à un public global et suscitant des propositions venues des quatre coins du monde. Chanel, la prestigieuse maison de mode, a même choisi de faire d’elle son ambassadrice. Audrey Tautou est devenue une véritable icône, et elle partage son parcours de photographe dans son livre Superfacial, publié aux éditions Fisheye.
Une vision de la célébrité éloignée des clichés
42mag.fr : Vous semblez être une vedette qui garde un pied dans la réalité, évitant volontairement les projecteurs et les excès pour ne pas se perdre. Cet ouvrage semble vouloir montrer que vous êtes simplement une femme ordinaire.
Audrey Tautou : Absolument. Je pense que cela explique pourquoi j’ai abordé la célébrité avec une certaine distance, avec un soupçon d’humour et de légèreté, des éléments que j’ai essayé de retranscrire dans ce livre.
Il semble qu’il y ait un désir, à travers ces photos, de défier les idées préconçues.
Effectivement, l’on nous met souvent sur un piédestal, nous créditant de qualités ou de pouvoirs que nous n’avons pas forcément. Des idées selon lesquelles je pouvais rencontrer n’importe qui ont circulé. Mais ce prestige, en réalité assez superficiel, je ne peux le considérer qu’avec amusement.
« Pour moi, le star-system a toujours eu un côté risible. »
Audrey Tautouà 42mag.fr
Avez-vous trouvé cela intimidant à certains moments ?
Oh oui, surtout au début.
Vous évoquez un certain bouleversement ressenti lorsque votre notoriété a décollé après Vénus Beauté (institut). En 2001, tout s’est accéléré, affectant votre liberté et votre vie personnelle.
C’est exactement cela. J’ai perçu cette période comme une limitation de ma liberté. Les mois qui ont suivi étaient comme un tourbillon suite à la sortie d’Amélie, d’une célébrité soudaine qui m’interdisait même de prendre le métro, restreignant ainsi ma mobilité libre. J’avais oublié à quel point cette perte de cette simple liberté de mouvement avait été pesante pour moi, bien que je devais en théorie me réjouir de pouvoir compter sur des voitures ou des taxis. Mais cela ne correspondait pas du tout à ce que je souhaitais vivre.
L’impact du succès et sa perception personnelle
Lorsque ce succès est arrivé, avez-vous envisagé qu’il y aurait un avant et un après ?
On m’a souvent mise en garde, et c’est ce que j’ai redécouvert en relisant mes journaux personnels lors de la préparation du livre. Des personnes me demandaient constamment : « Avez-vous réalisé à quel point cela va changer votre vie ?« . Et j’écrivais : « Je suis devenue complètement idiote, incapable de comprendre ce qu’ils voulaient dire« . On ne vit pas ces expériences de la même manière au début, notamment lorsqu’on capte que le regard des gens change et que nos relations avec nos proches, ou même les moins proches, évoluent sous cette nouvelle lumière. Les repères se modifient.
Le choix de l’argentique : une passion pour l’imprévu
Abordons votre préférence pour l’argentique. Ce choix reflète un côté artisanal que l’on retrouve dans les films que vous avez choisis de tourner.
« Ce que j’aime dans l’argentique, c’est cette inconnue, ces surprises ! »
Audrey Tautouà 42mag.fr
Avec la pellicule, il y a toujours l’incertitude quant au résultat final. Le temps entre le moment où l’on dépose sa pellicule et celui où l’on récupère ses clichés crée une certaine distance, un suspens qui fait que revoir ses images peut engendrer des émotions fortes. Parfois, c’est de la déception, mais quand l’image parvient à susciter l’émotion espérée, c’est une vive excitation que seule la photographie peut produire.
Un regard introspectif grâce à l’écriture personnelle
Votre écriture manuscrite apparaît comme très intime. C’est une fenêtre sur l’authenticité de votre personne.
Oui, c’est justement cette spontanéité qui me ressemble. L’écriture est sans doute plus intime qu’un autoportrait, lequel reste en quelque sorte filtré. Grâce aux mots que l’on choisit et aux phrases que l’on façonne, même avec erreurs volontaires, j’ai gardé des fautes pour préserver cette authenticité. Parfois, le correcteur me proposait des reformulations plus adéquates, mais elles ne reflétaient pas mes pensées immédiates. Même imparfaites, ces expressions sont plus proches de mon essence.
Malgré votre évolution, votre regard se révèle aussi déterminé et curieux qu’avant. Est-ce ce qui vous caractérise le plus ?
Il est vrai que je nourris une immense curiosité envers les gens, les cultures, les lieux, ou les œuvres. Je trouve toujours matière à émerveillement, même dans les petites choses.