Cette interview fait partie du programme intitulé « Il suffit d’écouter les femmes » créé par l’Ina. Ce programme sera diffusé le 21 janvier sur le site internet de l’Ina.
« Nous étions certains que je ne survivrais pas. » L’ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira, a confié avoir subi un avortement clandestin dans sa jeunesse, lors d’une interview accordée à l’Institut national de l’audiovisuel (Ina), révélée ce jeudi 12 décembre. Ce témoignage sera diffusé pour célébrer le cinquantième anniversaire de la loi Veil en janvier.
« À l’hôpital, je me souviens du médecin qui m’interroge (…) Qui vous a infligé cela ? Je perçois des termes, curetage, boucherie », raconte l’ancienne candidate à la présidence, à qui il ne vient pas à l’esprit, « même un millième de seconde, l’idée de trahir la femme responsable de cela ».
Début de la diffusion des récits le 21 janvier
Cette interview fait partie du programme intitulé « Il suffit d’écouter les femmes » de l’Ina, prévu pour janvier. Le projet a bénéficié de l’appui d’un comité scientifique. « Aucun femme ne choisit l’avortement le cœur léger. Il suffit d’écouter les femmes », déclarait Simone Veil en faveur de sa législation future visant à décriminaliser l’avortement. Depuis, la France est devenue, en mars, le premier pays au monde à intégrer dans sa Constitution la « liberté garantie » d’accès à l’IVG.
Après un appel lancé sur les réseaux sociaux et dans les journaux locaux, l’Ina a sélectionné 79 récits de femmes ayant avorté avant 1975, d’accompagnateurs, de personnes pratiquant des avortements illégaux, de proches endeuillés par la perte d’une mère ou d’une épouse, ainsi que d’un avocat et d’un juge d’instruction.
Un sentiment d’urgence avant que ces voix ne s’effacent
La plus âgée des témoins a 99 ans et travaillait dans un établissement d’accouchement durant la Seconde Guerre mondiale, où les femmes aisées de Tours se rendaient pour avorter. La plus jeune a 70 ans et a avorté lorsqu’elle fréquentait le lycée, avec l’assistance de son petit ami. L’écrivaine Annie Ernaux, lauréate du prix Nobel de littérature, partage également son expérience traumatisante des années 1960, décrite dans son livre L’événement.
L’Ina diffusera ces témoignages à partir du 21 janvier sur entretiens.ina.fr au sein de sa collection d’« entretiens patrimoniaux ». Ces récits seront également disponibles dans un documentaire coproduit par France télévisions, un livre coédité par Flammarion, et une fiction audio en cinq épisodes. Avec un « sentiment d’urgence » de préserver ces souvenirs avant qu’ils ne s’évanouissent, Isabelle Foucrier, productrice à l’Ina et coordinatrice du projet, s’est employée à capter « l’authenticité, le quotidien, l’expérience ordinaire et pré-militante de la clandestinité » des avortements avant la promulgation de la loi Veil, précise-t-elle.