François Bayrou, qui est à la tête du Mouvement Démocrate et dirige également la ville de Pau en tant que maire, prend la relève à Matignon après le court mandat de Michel Barnier. Ce dernier n’a occupé le poste de Premier ministre que pendant trois mois avant d’être désapprouvé par l’Assemblée nationale.
Il n’y a plus de doute. Emmanuel Macron a fait le choix de François Bayrou, un de ses alliés les plus loyaux, pour remplacer Michel Barnier. L’annonce officielle de cette nomination au poste de Premier ministre est intervenue le vendredi 13 décembre par un court communiqué de l’Élysée. Cette décision, qui a alimenté le suspense jusqu’au dernier moment, a été précédée d’une rencontre de près de deux heures, entamée à 8h30, entre le Président de la République et le leader du MoDem. Ce n’est qu’à 12h45 que la nouvelle a été rendue publique.
François Bayrou, en tant qu’allié de longue date du président, était pressenti pour ce rôle depuis la démission du gouvernement, le 4 décembre. Sa position centriste lui offrira-t-elle la possibilité de nouer un accord de non-censure avec une partie de la gauche à l’Assemblée nationale, un élément crucial pour permettre au nouveau gouvernement de tenir plus longtemps que son prédécesseur ?
Depuis sept ans et demi, François Bayrou, aujourd’hui âgé de 73 ans, a joué le rôle d’un partenaire exigeant au sein du camp présidentiel. Le groupe qu’il dirige à l’Assemblée nationale a réussi à limiter les pertes lors des élections législatives de 2022 (avec 48 sièges) et de 2024 (avec 36 sièges), et son parti a obtenu des responsabilités dans différents gouvernements, tels que ceux dirigés par Édouard Philippe, Jean Castex, Élisabeth Borne, Gabriel Attal et Michel Barnier.
Un centriste à la tête du gouvernement
L’alliance entre François Bayrou et Emmanuel Macron remonte à la campagne présidentielle de 2017. À cette époque, François Bayrou, étant en retard dans les sondages, avait décidé de se retirer de la course, facilitant ainsi la progression d’Emmanuel Macron, alors ancien ministre de l’Économie sous François Hollande, vers le second tour. Le maire de Pau a ensuite intégré le premier gouvernement d’Édouard Philippe en tant que ministre de la Justice, mais a dû se retirer un mois plus tard à la suite d’une enquête préliminaire portant sur des emplois fictifs présumés dans le cadre des assistants parlementaires du MoDem, parti fondé par lui en 2007. Bien qu’il ait finalement été relaxé en février, le parquet a décidé de faire appel.
Malgré ces difficultés judiciaires qui l’ont écarté des fonctions ministérielles, François Bayrou, ancien ministre de l’Éducation nationale sous le gouvernement Balladur (1993-1995), a été désigné en septembre 2020 en tant que haut-commissaire au Plan. Il y était chargé de « coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective menés au nom de l’État, ainsi que d’éclairer les décisions des pouvoirs publics face aux enjeux démographiques, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, technologiques et culturels ». Toutefois, son travail a été critiqué en avril par des sénateurs écologistes, le définissant comme une « coquille vide ».
Début décembre, après la censure du gouvernement de Michel Barnier, François Bayrou a été appuyé par Bernard Cazeneuve, un autre nom mentionné pour Matignon. Ce dernier a déclaré, lors d’interventions sur LCI et BFMTV, que François Bayrou « possède une expérience politique indéniable. Il a occupé des responsabilités au sein de l’État et a une compréhension des affaires publiques ».
Saura-t-il se maintenir plus longuement que son prédécesseur ? Emmanuel Macron, face à une crise politique inédite, avait promis le jeudi 5 décembre de former un gouvernement « d’intérêt général ». Finalement, le président s’est tourné vers un profil centriste après avoir consulté mardi les groupes politiques, à l’exception de La France insoumise et du Rassemblement national. Si l’engagement de ne plus dépendre du RN a satisfait les chefs des autres partis, certains demeuraient perplexes quant à la méthode du chef de l’État. La gauche réclamait toujours un Premier ministre issu de ses rangs, tandis que la droite refusait toute collaboration avec l’actuel gouvernement.
Avec l’entrée de François Bayrou à la tête du gouvernement, celui-ci prend la suite de Michel Barnier, le Premier ministre le plus bref de la Ve République. Michel Barnier avait utilisé l’article 49.3 pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale, mais a été renversé par une motion de censure appuyée par le Rassemblement national (RN) et le Nouveau Front populaire (NFP). Après avoir remis sa démission le 5 décembre, Michel Barnier avait géré les affaires courantes, sans réussir à bâtir un consensus au-delà de la fragile coalition des macronistes et de la droite dans un Parlement divisé en trois grands blocs.
La priorité du budget 2025
Sans majorité claire, le nouveau Premier ministre devra également relever un défi complexe pour éviter un sort similaire à celui de Michel Barnier. Il lui incombera de négocier avec les différentes formations politiques pour assurer leur participation au gouvernement, obtenir leur appui pour les futurs projets de loi, ou au moins conclure un accord de non-censure avec les oppositions. Mardi, Emmanuel Macron a affirmé qu’il n’envisageait pas de dissoudre à nouveau l’Assemblée avant la fin de son mandat. Cela constitue une manière d’inciter les forces politiques à trouver un terrain d’entente.
Le chemin est étroit, même si les socialistes se sont montrés plus ouverts que leurs partenaires du NFP pour discuter. « Il sera nécessaire que nous ayons (…) une discussion avec la personne qui sera nommée », a ainsi déclaré Olivier Faure mardi, car « quelle que soit la situation », il est crucial d’« obtenir des avancées pour les Français ».
Après la constitution du nouveau gouvernement, une des priorités pour François Bayrou sera de reprendre les discussions autour du budget de 2025. Une loi spécifique, permettant au gouvernement de lever les impôts et d’engager les dépenses sur la base du budget 2024, a été présentée lors du Conseil des ministres mercredi et doit être débattue le 16 décembre à l’Assemblée. Toutefois, l’adoption d’un budget conforme s’avèrera nécessaire, notamment pour réduire le déficit, qui a fortement augmenté cette année.