Depuis septembre 2020, le nouveau locataire de Matignon dirigeait cet organisme de réflexion stratégique, fondé par le général de Gaulle en 1946.
François Bayrou à Matignon : un retour marqué par une expérience au HCP
Le vendredi 13 décembre, François Bayrou a accédé au poste de Premier ministre, renouant ainsi avec Matignon, un lieu avec lequel il entretenait déjà un lien important. Depuis septembre 2020, cet allié proche d’Emmanuel Macron était à la tête du haut-commissariat au plan (HCP), une structure de réflexion rattachée au chef du gouvernement et réactivée pendant la crise sanitaire.
À l’époque, le fait de diriger cet organe de prospective, créé par le général de Gaulle en 1946, redonnait à François Bayrou, alors maire de Pau récemment réélu, une place de choix sur la scène politique nationale après avoir été moins présent médiatiquement entre 2017 et 2020. Mais que retenir de son passage de quatre ans à la tête du haut-commissariat en tant que président du MoDem ?
En 2023 et 2024, le HCP fonctionnait avec un budget de 1,9 million d’euros et une équipe équivalente à presque 14 personnes à temps plein. Durant cette période, il a publié 18 notes stratégiques et trois autres rapports, comme en témoigne un rapport du Sénat présenté en septembre par Christopher Szczurek, sénateur du Rassemblement national. Le sénateur critique que, dans la plupart des cas, les notes du HCP ne se démarquent pas de celles produites par d’autres entités administratives et qu’« certaines d’entre elles peuvent même paraître moins précises et détaillées ».
Des préconisations jugées peu concrètes
Le rapport sénatorial relève aussi l’« absence de publication sur les enjeux numériques, malgré l’importance de ce sujet mentionné par le président de la République », ainsi qu’un « intérêt limité pour les préoccupations des jeunes » et des recommandations « peu opérationnelles ». Ces observations ont été déjà exprimées, notamment au printemps 2024, lors d’un débat provoqué par des sénateurs écologistes sur le bilan du HCP. Guillaume Gontard avait qualifié l’institution de « coquille vide », tout en reconnaissant que quelques études avaient pu être « intéressantes », mais affirmait qu’un simple « think tank » aurait pu fournir des résultats similaires avec un budget trois fois inférieur.
Parallèlement, la sénatrice Vanina Paoli Gagin a écrit sur le site des Indépendants que le problème du haut-commissariat n’était pas la qualité de ses travaux mais le fait que « personne ne les applique ». Selon elle, il s’agit d’un « laboratoire d’idées plutôt qu’un modeleur pratique ». François Bayrou répondait au Monde en 2022 que les documents produits par ses soins, abordant des sujets tels que le nucléaire ou la dette, avaient « été utiles au président dans ses réflexions » et estimaient avoir permis de « changer la perception de l’opinion sur des questions sensibles ».
Un rôle fortement personnalisé
Au-delà de la structure elle-même, c’est surtout la nomination de François Bayrou et son style à incarner la fonction qui ont été critiqués par les sénateurs. Christopher Szczurek dénonçait « une forte personnalisation de la fonction » de haut-commissaire ainsi que les importantes responsabilités politiques que François Bayrou continuait à remplir parallèlement à son mandat, ce qui selon lui, « pose de sérieuses questions ». Le sénateur indiquait aussi que le choix d’installer l’instance à Pau, fief de François Bayrou, semblait motivé par un « souci personnel de commodité pour le haut-commissaire ». À noter également que François Bayrou exerçait cette fonction bénévolement, sans percevoir de « rémunération ou indemnité ».
De plus, le sénateur écologiste Thomas Dessous a également critiqué François Bayrou, évoquant un manque de transparence dans sa gestion de l’institution. Selon lui, il opérait « de manière un peu fermée, ce qui montre bien que cela dysfonctionne », jugeant le haut-commissaire « insuffisant face aux enjeux actuels ». François Bayrou avait alors réagi sur 42mag.fr, qualifiant ces critiques de dénuées de fondement et les attribuant à une « intention malveillante ».