Le président français Emmanuel Macron a rencontré vendredi des dirigeants politiques alors qu’il cherche à construire ce qu’il a appelé un « arc de gouvernement » pour résoudre une crise politique déclenchée par la censure historique du Premier ministre Michel Barnier.
Le président a lancé des négociations avec ses alliés du camp centriste, notamment des dirigeants de Renaissance, MoDem, Horizons, Radicaux et UDI, ainsi que des personnalités socialistes.
Alors que le parti de droite Les Républicains était invité à l’Elysée, les représentants d’extrême droite du Rassemblement national, d’extrême gauche France Insoumise, des Verts et du Parti communiste étaient notamment absents.
Les invitations sélectives témoignent de la stratégie de Macron visant à créer de nouvelles alliances tout en divisant potentiellement la coalition de gauche du Nouveau Front populaire.
Macron « a forgé sa propre coalition républicaine (arc-en-ciel) mais n’a pas beaucoup de flèches pour son arc », a ironisé la secrétaire nationale écologiste Marine Tondelier sur RMC.
De son côté, le leader socialiste Olivier Faure affirmait : « Nous irons à l’Elysée parce que nous l’avons demandé. Ceux qui pensent que le Parti socialiste est à vendre se trompent. »
Le chef de file de La France Insoumise, Manuel Bompard, a rejeté l’idée de négocier une coalition avec le camp de Macron, déclarant que « les socialistes feront ce qu’ils veulent », considérant toute négociation comme une rupture avec leurs engagements envers l’électorat.
L’effondrement du gouvernement Barnier après un vote de censure a obligé Macron à se démener pour stabiliser sa présidence. Lors d’un discours télévisé jeudi, il s’est engagé à nommer un nouveau Premier ministre « d’ici quelques jours » et à former un cabinet rationalisé.
L’annonce n’est toutefois attendue qu’après le week-end.
Macron présidera samedi la grande réouverture de Notre-Dame, à laquelle de nombreux dirigeants mondiaux – dont le président élu américain Donald Trump – sont attendus.
Le budget, une priorité absolue
Le défi immédiat du nouveau gouvernement sera de sortir de l’impasse concernant le budget controversé de 2025, qui a été un facteur clé dans la chute de Barnier.
Macron a déclaré que la nouvelle administration donnerait la priorité à l’adoption d’une législation temporaire pour assurer la continuité des services publics.
« Cette loi temporaire prolongera pour 2025 les choix faits en 2024 », a déclaré Macron, ajoutant qu’elle « garantirait le fonctionnement des services essentiels, protégerait les citoyens français et maintiendrait les obligations envers l’Union européenne ».
La loi spéciale, qui doit être présentée au Parlement avant la mi-décembre, permettra au gouvernement de maintenir les recettes fiscales et de financer des secteurs critiques tels que la défense, la justice et l’éducation.
Toutefois, cela pourrait accroître les tensions politiques, puisque 380 000 ménages supplémentaires pourraient devenir imposables en raison de l’inflation et du gel des seuils d’imposition sur le revenu.
Pendant ce temps, les spéculations se multiplient sur le successeur de Barnier.
Le leader centriste du MoDem, François Bayrou, s’est imposé comme l’un des favoris après avoir dîné avec Macron jeudi. Parmi les autres noms évoqués figurent l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, le ministre des Armées Sébastien Lecornu et les hommes politiques de centre-droit Xavier Bertrand et François Baroin.
« L’irresponsabilité » de l’opposition
Lors de son discours télévisé de jeudi, qui a rassemblé plus de 17 millions de téléspectateurs à travers la France, Macron a dénoncé « l’irresponsabilité » de ce qu’il a qualifié de « front anti-républicain où l’extrême droite et l’extrême gauche se sont unies » contre Barnier.
Le chef du Rassemblement national, Jordan Bardella, aurait demandé une rencontre avec le futur Premier ministre pour discuter des « lignes rouges » pour chaque force politique représentée au Parlement – soulignant que « celles-ci sont toujours les mêmes » pour son parti d’extrême droite.
À son tour, le leader de France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a accusé le président d’être « la cause du problème », prédisant que Macron « partirait par la force des événements ».
Reconnaissant les critiques concernant sa décision de dissoudre le Parlement et de convoquer des élections anticipées plus tôt cette année, Macron a admis : « Beaucoup m’en ont blâmé, et je sais que beaucoup continuent de m’en vouloir. »
Il a toutefois redoublé son intention d’aller au bout de son mandat « jusqu’au bout », en 2027.