Les autorités accusent les volontaires de l’association d’avoir sollicité les secours pour des bateaux prétendument en danger, alors qu’ils ne l’étaient pas réellement.
Selon les informations relayées par France Bleu Nord ce mercredi, l’organisation d’assistance aux migrants Utopia 56 est actuellement le sujet de trois investigations préliminaires en raison de plaintes émanant des autorités. Une enquête a été activée pour « diffamation » et les deux autres concernent la diffusion de « fausses informations ». C’est Utopia 56 elle-même qui a divulgué l’existence de ces enquêtes.
Le procureur de la République de Boulogne a confirmé à France Bleu Nord avoir reçu deux signalements émanant de la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord, datés des 25 juillet et 18 septembre 2023. Le parquet a indiqué avoir confié l’enquête à la gendarmerie maritime du Havre. Cette action vise à faire la lumière sur « des faits qualifiés de communication ou divulgation d’une fausse information, ce qui pourrait amener à croire à un accident fictif, entraînant ainsi l’intervention inutile des secours« . Les autorités reprochent aux volontaires d’Utopia 56 d’avoir sollicité les secours pour des embarcations soi-disant en péril, alors que tel n’était pas le cas. « Ceci aurait pour but de détourner leur attention d’autres urgences réelles, mettant ainsi potentiellement en danger des vies« , explique l’association.
La deuxième enquête concerne un bénévole qui a alerté les secours en août 2024 au sujet d’une rumeur concernant le décès d’un enfant, transmise par des tiers. Il avait précisé « clairement qu’il ne pouvait certifier les faits et ne faisait que partager des témoignages reçus dans un contexte de panique« , précise Utopia 56.
La dernière enquête porte sur une accusation de diffamation dirigée contre les forces de l’ordre en raison de déclarations faites sur X en avril 2024, mentionnant un bateau incendié.
L’association exprime sa volonté de coopérer avec la justice
« Utopia 56 réfute toute idée selon laquelle ses bénévoles instrumentaliseraient les appels aux secours. Ceux-ci peuvent se retrouver, comme malheureusement trop souvent, devant des situations nécessitant l’intervention d’urgence et des soins médicaux« , déclare l’association.
C’est la première fois qu’une telle série d’enquêtes touche Utopia 56. Le co-fondateur et délégué général Yann Manzi n’est pas surpris par ces démarches, la structure ayant déjà engagé des actions en justice contre l’État après des naufrages. Utopia 56 souligne avoir reçu en 2024 environ 400 appels de personnes en détresse. « Fréquemment, la police ou les pompiers sollicitent notre aide sur les côtes, dépassés par l’ampleur de la situation« , explique Yann Manzi à France Bleu Nord.
« On nous met des bâtons dans les roues, on entrave notre coopération. D’un côté, les autorités locales ne veulent pas dialoguer avec nous, mais sur le terrain, les équipes opérationnelles font appel à notre soutien en raison de leurs ressources limitées ! C’est tout simplement paradoxal. »
Yann Manzià France Bleu Nord
Utopia 56 indique qu’elle est prête à répondre de ces différentes procédures judiciaires. « Nous ferons valoir tous les éléments nécessaires aux enquêteurs, prouvant que notre action est menée de bonne foi, en conformité avec la loi, et toujours en visant la protection des vies humaines« , affirme l’association.