Que se passe-t-il si une motion de censure est adoptée et que le budget se trouve paralysé ? Serons-nous toujours en mesure de nous servir de nos cartes Vitales ? Pour avoir plus de précisions, nous nous sommes tournés vers Benjamin Morel, expert en droit constitutionnel.
Benjamin Morel, spécialiste en droit constitutionnel, déclare que si l’Assemblée nationale ne vote pas le budget de la Sécurité sociale d’ici au lundi 2 décembre, le gouvernement pourrait recourir à l’article 49.3 pour l’adopter sans vote. « Soit l’Assemblée choisit de ne pas déposer de motion de censure et accepte le texte, soit elle décide de soumettre une motion de censure », précise-t-il. « Dans le cas où la motion de censure serait adoptée, cela entraînerait la chute du gouvernement et le rejet officiel du texte ».
Malgré cela, Benjamin Morel affirme que l’absence de vote sur le budget avant le 31 décembre ne pose pas de problème majeur. « Cela rend la situation fortement dysfonctionnelle mais sans gravité excessive« , selon ses dires. Il argumente que « la jurisprudence impose une obligation de garantir la continuité des services publics fondamentaux. De ce fait, les cartes Vitale continueront de fonctionner et les salaires des fonctionnaires seront versés« .
Conséquences à long terme d’un blocage du budget
Bien que les services essentiels puissent poursuivre leur activité, Benjamin Morel avertit que « une telle situation n’est pas vraiment idéale. Toutes les dépenses exceptionnelles, d’investissement, ainsi que les ajustements tels que l’augmentation des retraites ou les remboursements des frais de santé, seraient figés sur le modèle de 2024 », précise-t-il.
Il souligne que « un État ne peut pas simplement se limiter à survivre; il doit également prendre des décisions et agir ». Un blocage qui s’étendrait sur une longue période pourrait causer une crise financière en raison de la hausse des coûts d’emprunt nécessaires pour combler la dette.
Pas de « shutdown » à l’américaine en France
Benjamin Morel écarte toutefois le risque d’un « shutdown » tel que vécu aux États-Unis. « Notre conception du droit parlementaire et de la procédure budgétaire est très différente de celle des Américains« , explique-t-il. En France, si le budget est bloqué, deux solutions s’offrent : exécuter le budget débattu par ordonnance ou voter des lois pour permettre au gouvernement de collecter temporairement les impôts.
« Il est possible de gérer les premiers mois de l’année en continuant de payer les fonctionnaires et de percevoir les impôts basés sur le budget de 2024, le tout en cherchant un compromis budgétaire », termine le constitutionnaliste. Cependant, ces solutions sont compliquées et loin d’être idéales sur le long terme.