L’avocat Charles-Henri Coppet, expert en droit du dommage corporel, évoque des « raisons avant tout financières » pour justifier l’écart de quatre ans observé entre les premières alertes internes et la diffusion initiale d’informations aux conducteurs.
« La logique financière a pris le dessus sur l’humanité, les motivations étaient strictement économiques », regrette ce mercredi sur 42mag.fr Charles-Henri Coppet, avocat expert en droit des dommages corporels. Il soutient neuf victimes grièvement blessées ainsi que sept familles de personnes décédées en raison d’airbags défectueux. Ce mercredi, le ministère des Transports lance une campagne destinée à sensibiliser les conducteurs quant aux rappels de véhicules dus à ces airbags dangereux.
D’après une enquête menée par la cellule investigation de Radio France, au moins 15 individus ont perdu la vie suite à l’explosion d’airbags défectueux en France. Pourtant, dès 2016, des alertes avaient été émises en interne sur le risque qu’ils représentaient au sein de Stellantis. De nombreux constructeurs sont impliqués, tels Stellantis (notamment la DS) et Citroën, ainsi que Volkswagen, BMW, Seat, Mazda, Toyota, Ford, Mercedes, et Opel. Au micro de 42mag.fr, Stéphane Cesareo, directeur de la communication de Citroën, a affirmé que les alertes avaient été prises en considération, tout en expliquant le délai pris : « Vous ne pouvez pas remplacer du jour au lendemain les airbags Takata [modèle mis en cause] par d’autres airbags X ou Y. Cela n’est pas faisable, et vous ne pouvez pas non plus mettre une usine à l’arrêt pendant un an et mettre 3 000 personnes en chômage technique pour remplacer une pièce. »
Un intervalle de quatre ans a été constaté entre les premières alertes internes et les premières informations délivrées aux automobilistes. « Cette justification est révoltante et constitue un aveu », s’indigne Me Coppet.
« Comment peut-on comparer le chômage technique d’une entreprise qui réalise des centaines de millions de bénéfices à la vie de dizaines de Français qui sont morts ou gravement blessés ? »
Charles-Henri Coppet, avocatà 42mag.fr
« C’est tout simplement révoltant », s’insurge Charles-Henri Coppet. « Cela démontre clairement que les entreprises privilégient leurs intérêts économiques plutôt que la protection des citoyens », assène l’avocat.
Permettre aux compagnies de gérer les rappels est « criminel », déclare Me Coppet
L’initiative de l’État pour informer les automobilistes concernés par ces rappels, touchant 100 000 véhicules en outre-mer et 500 000 en métropole, est accueillie positivement par l’avocat, « mais elle arrive bien trop tard et reste incomplète », déplore-t-il. « Actuellement, autoriser les sociétés à choisir les modalités et le moment du rappel d’un produit est criminel », selon Charles-Henri Coppet.
Il appelle à une augmentation des moyens pour la justice afin de mener des enquêtes plus poussées. « Il est indispensable de cesser ces enquêtes fragmentaires, territoire par territoire, dispersées, avec des juges qui n’ont pas la capacité d’investiguer sur ce véritable scandale financier », analyse-t-il. Ses clients souhaitent avant tout « être écoutés, pour éviter de nouvelles victimes, car ils ressentent pleinement l’absurdité de ce qui s’est abattu sur eux ».