Dans leur ouvrage intitulé « Les Juges et l’assassin », les auteurs Gérard Davet et Fabrice Lhomme examinent les six premiers mois de la crise sanitaire et dévoilent, entre autres, que certains rapports visant à anticiper une pandémie n’ont pas été pris en considération.
Alors que Gérard Davet et Fabrice Lhomme publient leur ouvrage intitulé Les juges et l’assassin, ils révèlent certaines coulisses de l’enquête judiciaire menée par la Cour de justice de la République. Cette enquête visait notamment l’ancien Premier ministre Édouard Philippe ainsi que ses ministres Agnès Buzyn et Olivier Véran, à propos de leur gestion de la crise sanitaire liée au Covid-19. Les deux journalistes du quotidien Le Monde ont déclaré sur les ondes de France Inter, le mercredi 22 janvier, qu’« il y a clairement eu une volonté de cacher la pénurie de masques » par le gouvernement.
Dès l’apparition de la pandémie, la problématique du port du masque a été sujet à controverse, surtout en ce qui concerne les stocks disponibles. Le gouvernement a souvent changé de position sur l’opportunité d’étendre ou non l’usage des masques à l’ensemble de la population. L’enquête menée par Gérard Davet et Fabrice Lhomme met en lumière que, durant la période allant de 2000 à 2020, 51 documents, incluant des rapports, des plans d’action et des circulaires, ont été élaborés par les autorités administratives françaises pour se préparer à une éventuelle pandémie.
Des recommandations ignorées
« Des rapports soulignaient l’inévitabilité d’une crise sanitaire proche et affirmaient qu’il existait des moyens pour s’y préparer, du moins dans les premières semaines : être bien équipé et outillé. Un point crucial était de disposer de stocks conséquents de masques, bien que ce ne soit pas le seul aspect», expliquent les deux journalistes. Cependant, toutes ces recommandations ont été ignorées avec le temps.
Durant la pandémie, il est apparu que les stocks de masques étaient largement insuffisants pour satisfaire la demande. Pourtant, comme l’indiquaient les auteurs, « en 2006, un rapport de l’OMS affirmait que la France était sans doute l’un des pays les mieux préparés pour affronter une pandémie ». Ils ajoutent : « Jusqu’en 2009-2010, nos stocks dépassaient les 2 milliards de masques. Lorsque la crise a éclaté, seulement quelques dizaines de millions étaient disponibles, dont une partie était périmée. Pire, certains masques encore utilisables ont été détruits. C’est complètement surréaliste, une situation incohérente. Nous avons donc fait face au virus totalement désarmés. »
Les auteurs révèlent également que leur livre contient des notes écrites par certains ministres lors des Conseils de défense et réunions ministérielles au début de l’épidémie. Ces documents démontrent qu’il y a eu une intention de dissimuler la situation des stocks de masques : « On constate, par exemple, qu’Édouard Philippe, alors Premier ministre, cherche à comprendre ‘ce qu’il s’est passé concernant les masques’. Ensuite, ce même Premier ministre, accompagné de ses ministres, apparaissait devant les médias en minimisant le problème, en déclarant : ‘Il n’est pas vraiment nécessaire de porter des masques, etc.’. C’est dans ce contexte qu’on peut clairement affirmer qu’une volonté de cacher la pénurie de masques existait. »