Quelque 115 000 élèves ont commencé lundi leur retour à l’école à Mayotte, six semaines après le cyclone Chido qui a dévasté l’archipel français de l’océan Indien. Les conditions restent difficiles tant pour les enseignants que pour les élèves et certaines écoles restent pour le moment fermées.
La rentrée scolaire, prévue le 13 janvier, avait déjà été reportée à deux reprises en raison des graves dégâts causés par Chido et la tempête Dikeledi.
Malgré les appels à de nouveaux retards, les autorités éducatives ont procédé à la réouverture lundi, soulignant l’importance de rester en contact avec les élèves.
Toutefois, 39 des 221 écoles primaires de Mayotte et trois de ses écoles secondaires ne rouvriront pas immédiatement en raison des importants dégâts.
Pour les enseignants comme pour les élèves, c’est une période difficile.
« Je suis assez pessimiste car les conditions sont très dégradées », a déclaré à 42mag.fr Olivier Thomas, professeur au lycée.
Il travaille au lycée Sada, à l’ouest de la Grande-Terre, l’une des trois îles de l’archipel. Il a été gravement endommagé et les élèves sont donc retournés dans des classes tournantes, les collégiens et lycéens y étant présents un ou deux jours par semaine.
« Nous accueillerons environ 650 élèves sur les 2 400 que nous aurions habituellement », a indiqué Thomas. « Tout ou partie du lycée est inaccessible en raison de travaux de réfection. Il n’y aura pas de cantine, pas d’accès aux laboratoires, ce sera donc une rentrée très difficile et très inhabituelle. »
L’école primaire de Chiconi, Grande-Terre, a choisi de retarder complètement sa réouverture pour des raisons de sécurité – une décision conjointe des autorités locales et des représentants des parents.
« Nous avons pris la décision collective de ne pas ouvrir l’école », a déclaré la représentante des parents d’élèves Fatima Mouhoussini. « Je ne peux pas permettre à mon fils d’aller dans une école où des morceaux de plafond tombent, de l’eau fuit et des câbles électriques pendent. »
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Inquiétudes concernant les enfants migrants
Youssouf Abdallah, enseignant dans une école primaire et représentant syndical, s’est dit préoccupé par le fait que tous les enfants ne reviendront pas.
« Beaucoup de nos élèves sont issus de familles de migrants, leurs maisons ont été détruites donc on ne sait pas s’ils reviendront. Ils ont peut-être disparu », a-t-il déclaré à 42mag.fr. « Ceux qui n’ont pas les moyens d’aller ailleurs et qui ne sont pas blessés reviendront certainement », a-t-il ajouté.
Même avant le cyclone, le système éducatif de Mayotte était mis à rude épreuve. Un rapport de 2022 a souligné l’inefficacité du système, avec des écoles surpeuplées fonctionnant selon un horaire tournant et proposant des repas scolaires limités.
La semaine dernière, environ 300 enseignants ont protesté contre le caractère « improvisé » du nouveau mandat.
Adda Fatihoussoundi, président de la Fédération locale parents-enseignants (FCPE), a qualifié la réouverture de « prématurée » et a critiqué le manque de conditions de sécurité adéquates.
Certaines écoles ont également été touchées par des cambriolages et des pillages suite au cyclone, et les enseignants s’inquiètent de l’impact psychologique que cela pourrait avoir sur les élèves.
En complément, des cours de français et de mathématiques sont diffusés quotidiennement sur la chaîne de télévision locale pour les élèves plus âgés du primaire. Des cellules de soutien psychologique ont été mises en place et une ligne d’assistance gratuite est disponible 24h/24 et 7j/7.
Près de 1 200 étudiants ont choisi de poursuivre leurs études hors de Mayotte, en majorité à La Réunion.
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Le ministre français de l’Outre-mer, Manuel Valls, a reconnu que le retour s’effectuerait « dans des conditions difficiles » et devrait se rendre à Mayotte plus tard dans la semaine pour évaluer la situation.
Il a suscité la polémique ce week-end, qualifiant l’immigration à Mayotte de « fléau » qui « tuait progressivement » l’archipel. Il a estimé qu’il fallait la réduire à « quasiment zéro ».
Les tensions dans l’archipel ont été ravivées la semaine dernière lorsque des familles de migrants qui avaient perdu leur maison dans le cyclone ont été hébergées dans un collège de Mamoudzou. L’école restera fermée jusqu’au 3 février au moins, a rapporté le correspondant local de 42mag.fr.